La situation économique de la Tunisie est préoccupante. La relance économique, effectivement bloquée, réduit les marges de manœuvre du pouvoir, paralyse la réponse aux attentes, conforte la précarité et le chômage. Vu l’affaiblissement des rentrées fiscales, le budget de l’année en cours peine à assurer les services de l’Etat.
Constat d’évidence des experts économiques, la Tunisie sera obligée de rééchelonner sa dette extérieure. Cette situation ferait perdre à la Tunisie sa crédibilité. L’accès au marché financier international sera très difficile. Prenons la juste mesure de la gravité de ce diagnostic de ces lanceurs d’alerte.
Le projet de former un gouvernement d’union nationale, annoncé par le Président de la République devait répondre aux défis de cette situation d’urgence. Peut-il réveiller le microcosme politique qui vit dans son monde virtuel ? En tout cas, l’expression hâtive, maladroite ou intéressée a pu accréditer cette idée d’une page à tourner. Le climat de remaniement, désormais à l’ordre du jour, fait plutôt valoir la course aux sièges que la formulation d’une feuille de route de « salut public ». « Participe ou ne participe pas », tel est l’actuel slogan. Des pseudo-politiques de l’alliance gouvernementale, – certains diraient des rentiers ! – se mobilisent dans ce contexte, pour critiquer injustement le chef du gouvernement actuel, alors qu’il a dû gérer un front institutionnel. D’ailleurs, les difficultés rencontrées traduisent davantage les errances des membres de son équipe. Certains d’entre eux n’hésitent pas à suggérer leur candidature à la tête du gouvernement. Des solistes peuvent-ils s’ériger, à la faveur de précipitations, en chefs d’orchestre ? Loi de la Palice, rappelée par Albert Einstein, ‘‘on ne règle pas les problèmes avec ceux qui les ont créés’’.
La posture des mouvances de la gauche politique, part d’un substrat idéologique proche. Les marxistes tous azimuts estiment, en effet, que ‘‘les événements sont le reflet d’une infrastructure économique. Et c’est cette infrastructure qu’il faut transformer pour changer la société’’. Dans l’état actuel des choses, de la suprématie de l’école libérale, le compromis gouvernemental devrait plutôt opter pour une société responsabilisée et un Etat régulateur, qui laisse une juste place pour une économie ouverte sur la compétition internationale. Aucun des futurs remplaçants n’incarnerait un tournant social, sinon gauchissant. Mais il faudrait, de toute façon, mettre fin au laisser-faire, de l’oligarchie narcissique, des groupes d’intervention et des relais extérieurs. Remettons à l’ordre du jour le principe de base de l’idéaltype bourguibien, l’indépendance nationale.
La crise provient – faut-il l’oublier ! – de la déficience de la plupart des partis, de leur incapacité à assurer l’encadrement de la population, à leur jeu underground et aux querelles de salon. L’heure n’est plus à la séduction mais à la persuasion, qui doit faire valoir le débat, la confrontation des points de vue, la coopération pour formuler une feuille de route de consensus. Les chaînes de télévision, actuellement indisponibles, dans ce mois par excellence de feuilletons, confortant les flashs de publicité, sont appelées à recréer l’environnement de la réflexion politique.