Comment sortir la Tunisie du marasme social ? Comment assurer les conditions d’un redressement économique ? Comment faire face au défi de la précarité, du chômage et de l’insécurité ? Comment appréhender le grave endettement gouvernemental ?
L’initiative du Président de la République, en faveur d’un gouvernement d’union nationale et vraisemblablement d’un changement de Premier ministre, change la donne.
Prenons la juste mesure de l’habilité chronologique, mais aussi thématique de la présidence: le ramadan est d’habitude un mois de chômage technique pour les responsables politiques. La vie publique y est réduite, apaisée. D’ailleurs la voix des politiques porte bien moins loin, pendant le mois du jeûne. L’initiative présidentielle appréhende les partis et les acteurs durant une période de pré-vacances, avant la trêve estivale, qu’elle a devancée. Mais aussi habilité thématique. Le débat se poursuit sur la crise sociale que vit le pays et fait valoir la situation d’urgence. Sous la contrainte, la coalition au pouvoir a déjà changé sa stratégie de fond. Elle met à l’ordre du jour l’élaboration d’une feuille de route. Mais les avis diffèrent sur les programmes nécessaires, pour répondre à un diagnostic largement partagé.
Les partis perdants, lors des élections de 2014, sont en pleine réflexion théorique sur leur avenir. La stratégie de « l’effet de contraste », du front populaire élargit conjoncturellement son audience. Mais il reste un acteur bien marginal sur la scène politique. Les partis de la coalition connaissent une déperdition idéologique. En raison de cette crise de contenu, plusieurs secteurs de la société se retrouvent en manque de représentation et en premier lieu les électeurs de Nida Tounes et d’Ennahdha. Qui peut capter cet énorme potentiel d’insatisfaction ? Tout le jeu d’Ennahdha consiste à occuper les marqueurs démocratiques et à les remplir d’un autre contenu. Elle doit son succès à sa « dédiabolisation » et à son repositionnement, au sein de la guerre des partis et essentiellement Nida Tounes.
La guerre des prétendants occupent désormais la scène publique. N’importe qui s’attribue les compétences de grands gestionnaires et même de chef de gouvernement d’union nationale. Nida Tounes et dans une moindre mesure Ennahdha se sont prêtés à ce jeu des candidats de l’incompétence. Des soi-disant observateurs non partisans ont organisé, à cet effet, une campagne contre les compétences qui se sont illustrées, dans l’ère pré-révolution. Il s’agirait de faire le vide, dans le cadre d’une lutte contre les concurrents éventuels, qui d’ailleurs ne se sont pas manifestés.
Constat d’un politicien engagé : ‘‘Confronté aux divisions de son camp, le Président de la République pourrait réactiver le clivage Nida Tounes/Ennahdha’’. Ce repositionnement serait-il le meilleur moyen, pour faire taire les divergences qui minent le parti qu’il a fondé ?