Face au constat que rien n’avance dans l’enquête des deux assassinats des figures de l’opposition Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi, les députés du Front populaire ont demandé une audition du ministre de l’Intérieur et de celui de la Justice, pour savoir s’il y a de nouveaux éléments dans les deux affaires.
La séance d’audition s’est déroulée en présence de 115 députés. Connaître la vérité, c’est l’affaire de tous, a déclaré Mustapha Ben Ahmed, député du bloc el Horra, en poursuivant : « Il faut révéler la vérité sur les assassinats de Chokri Belaïd, Mohamed Brahmi et Lotfi Naguedh, parce que les éléments d’un procès équitable n’ont pas été respectés vu qu’il n’était pas public. »
Même constat pour Ahmed Seddik, député du Front populaire qui réaffirme une fois de plus le non-respect des procédures légales.
Rappelant le déroulement des faits du 6 février 2013, date de l’assassinat de Chokri Belaïd, Faycel Tebbini, député de la Voix des agriculteurs, a déclaré que « plusieurs éléments de l’enquête ne sont pas encore connus, comme le cas de ce conducteur d’ambulance présent sur les lieux qui, interrogé dans l’affaire de Belaïd, a nié avoir vu des personnes présentes sur la scène du crime puis a été arrêté pour consommation de drogue ».
D’autres députés ont demandé si des sanctions avaient été prises à l’encontre de l’imam qui avait appelé au meurtre de Chokri Belaïd et qui ne ratait pas une occasion pour se servir de la mosquée comme d’une tribune idéale pour inciter à la haine et à la violence. Nourredine Ben Achour, député du Nidaa Tounes a indiqué pour sa part : « L’appel au meurtre de Chokri Belaïd a bel et bien commencé depuis la mosquée, quel est le sort de cet iman? Où est-il aujourd’hui? Pourquoi personne n’en parle?. »
Certains députés évoquent une conspiration dans cette affaire, tel est le constat de Houcine Jaziri, député du mouvement Ennahdha : « L’assassinat de Chokri Belaïd est une conspiration contre la Tunisie. Le peuple d’Ennahdha veut connaître la vérité. »
Pour d’autres, pour connaître la vérité, « il faut que le pouvoir judiciaire soit indépendant et expurgé des mauvais éléments », a affirmé de son côté Lotfi Nabli, député du Nidaa Tounes.
Pour Ferida Abidi, députée du mouvement Ennahdha, ce qui est arrivé à Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi a failli provoquer une guerre civile.
Cela dit, tout au long de la séance, la tension est montée d’un cran entre les députés du Front populaire et du mouvement Ennahdha où les accusations ont fusées de tous côtés.
Face à ces accusations, Samir Dilou, député du mouvement Ennahdha, a souligné : « Certaines accusations dépassent le concept de concurrence politique. Certains nous accusent de violence et de plus que ça, et invitent à dissocier des institutions démocratiques. »
Sur le volet de l’enquête du dossier Mohamed Brahmi, Omar Mansour, ministre de la Justice, a fait savoir que trois accusés ont été arrêtés pour une peine de sept ans d’emprisonnement. Il poursuit : « En ce qui concerne le document envoyé et relatif à l’avertissement d’un acte d’assassinat, en réalité il y a eu deux documents. »
Sur l’affaire Belaïd, Hédi Majdoub, ministre de l’Intérieur a indiqué que « l’examen balistique d’Interpol a dévoilé que Belaïd a été assassiné par une arme de 9 mm qui a été présentée au juge d’instruction fin mars 2013. Alors qu’un autre examen balistique présenté par les autorités hollandaises a démontré que l’arme du crime était un Beretta de type 92-93, ce type d’arme n’étant pas utilisé par les forces de l’ordre tunisiennes. »