Produit d’une concertation entre les organisations nationales et la plupart des partis politiques, l’accord de Carthage, signé le 13 juillet 2016, définit le programme du gouvernement d’union nationale.
Constat d’évidence, le préambule reconnaît que la période de transition n’a pas réalisé les objectifs de la « révolution », dans le domaine de l’emploi et du développement régional. Il relève l’augmentation du taux de chômage, le recul des indicateurs de croissance, la diffusion de la corruption, le développement de la contrebande et de l’évasion fiscale et le recul de l’investissement.
Le pays a été « affligé » par les pertes dans le secteur des phosphates et du tourisme, alors que le niveau de l’endettement augmente. La Tunisie vit une conjoncture difficile, marquée par le recul de la plupart des indicateurs économiques et le développement du terrorisme. La « feuille de route » a pour objectif de transgresser la crise, permettant le passage à une « nouvelle étape, ouvrant les portes de l’espoir à la jeunesse ». Ce qui exige, selon ce rapport :
- d’enraciner la transition démocratique et la protéger des dérives;
- d’élaborer un programme de promotion économique, associant les secteurs publics et privés;
- d’établir un programme d’urgence pour les secteurs en difficulté.
Priorités définies :
- Remporter la victoire sur le terrorisme;
- Réaliser la promotion économique;
- Lutter contre la corruption et établir la bonne gouvernance;
- Maîtriser les équilibres financiers et poursuivre la mise en place d’une politique sociale efficace;
- Etablir une politique en faveur des villes et des collectivités locales;
- Renforcer l’action gouvernementale et parachever l’enracinement des institutions.
Ce diagnostic est largement partagé. Mais il n’indique point le choix du projet de société qu’il défend, en relation avec les attentes des acteurs de la révolution, qu’il cite sommairement. La population souhaite, en conséquence, une importante évolution du droit social ou du périmètre de l’action publique. La feuille de route évite de se prononcer sur un possible blocage des prix, revendiqué par la population. Est-ce que la crise globale fait valoir un tournant de la rigueur? Point de réponse de la feuille de route. On évoque une politique sociale efficace, constituant l’environnement de la croissance économique. S’agirait-il d’une possible promotion d’une économie sociale de marché, dans le cadre d’un compromis possible de l’UGTT et de l’UTICA? L’évocation de la crise des caisses sociales n’est pas accompagnée par les solutions préconisées. Est-ce que le développement régional n’impliquerait pas une décentralisation politique et économique?
Peut-on affirmer que l’économie obéit aux ordres du politique? En tout cas, l’évocation de la relance économique reste générale. Est-ce à dire qu’elle échapperait aux acteurs nationaux? N’aurait-il pas été recommandé de poser la question de l’échange inégal avec nos partenaires?
Le programme ainsi défini est ambitieux dans ses objectifs, pragmatique dans ses moyens, mais sans logique interne en matière d’économie politique et de vision sociale. Peut-être faudrait-il expliciter le non-dit, la prise de connaissance de la crise globale et l’appel à une mobilisation générale solidaire, pour faire face aux défis? L’initiative présidentielle a ainsi réussi à bâtir de nouvelles convergences, pour assurer une mobilisation générale, au service de la réussite de la transition économique.