La symbolique du 25 juillet 1959 et sa charge historique sont si importantes dans notre mémoire collective. Il y a trois ans, les Tunisiens ont en effet été endeuillés par le lâche assassinat de Mohamed Brahmi. Malheureusement, rien n’avance dans l’enquête sur son assassinat.
Le 25 juillet 2016, jour où les Tunisiens fêtent le 59e anniversaire de la proclamation de la République, les attentes sont à l’ordre du jour. Le grand peuple de Tunisie doit de nouveau patienter, dans un tourbillon d’incertitudes et d’inconnues, avant de voir la lumière du bout du tunnel. Le pays est tel un bateau ivre, allant à la dérive. La logique des partis a fini par prévaloir en imposant au reste de la société son agenda politique et ses préférences idéologiques.
La fracture est perceptible : le pays légal s’éloigne du pays réel. La désillusion, le désenchantement gagnent de larges pans de la société, provoquant la confusion et l’inquiétude jusque dans les rangs de la majorité au pouvoir. D’aucuns s’irritent et crient leur désaffection de la politique.
La tension monte, à mesure que persistent et s’aggravent les désaccords. Le discours politique change de tonalité et se durcit, alors même que des voix s’élèvent en faveur de l’incontournable nouveau gouvernement d’union nationale. L’invective, l’anathème, les menaces de démission, d’exclusion s’emparent de tous et de tout un chacun, à l’heure où le consensus devrait être la règle.
Pendant ce temps-là, l’économie prend eau de toutes parts. L’appareil productif est lourdement impacté par le désordre ambiant, la dégradation du climat des affaires et les difficultés du secteur bancaire. Les déficits explosent, privant l’Etat de moyens et de marges de manœuvre pour poursuivre notamment sa politique de traitement social du chômage des jeunes diplômés qui reprend de plus belle.
L’inflation s’incruste dans le paysage sociétal et nourrit déception, colère et protestation. La spirale prix-salaires menace de compromettre définitivement les quelques îlots de compétitivité qui résistent dans le paysage industriel. La dette extérieure, encore soutenable- mais jusqu’à quand ?- progresse à deux chiffres. Le recours à l’emprunt devient plus onéreux. Le comble est que l’on s’en sert, au mieux, pour rembourser la dette, au pire, pour financer nos achats de biens de consommation. Exit l’investissement.
Le pays perd en attractivité ce qu’il gagne à peu de frais en droits et libertés déliés d’obligations, de devoirs civiques et républicains.
Moralité : l’économie est au plus mal, en dépit des difficultés pour redresser les courbes de l’investissement, du chômage, du déficit extérieur, de l’inflation… Le moral des chefs d’entreprise n’est pas bien meilleur. On pouvait imaginer, sinon espérer, que les difficultés que vivent les Tunisiens au quotidien finiront par provoquer un déclic et un sursaut.
Malaise social, désillusion des jeunes sans emploi et sans perspective et l’alerte vaut pour tout le monde, même si le pire n’effleure même plus les esprits..
Nous voilà à la croisée des chemins, au milieu d’un vaste champ de difficultés économiques, politiques et sociales. Certaines s’apparentent à de véritables bombes à retardement. Elles peuvent exploser à tout moment. L’accalmie de l’été pourrait n’être que de courte durée. A moins que d’ici là, la population perçoive des signes de détente avec l’annonce d’un nouveau gouvernement qui fasse l’unanimité autour de lui et qui ne laisse pas de place au doute.
Et surtout d’une volonté de la part de tous de se projeter dans un avenir débarrassé de tout contentieux et de toute animosité politique.