Situation paradoxale, alors que la récession prend de l’ampleur — la croissance est de 1,4%, le taux de chômage est de 15,6%, pour le deuxième trimestre 2016, la praxis gouvernementale connaît, malgré les apparences, un relâchement significatif, depuis l’annonce de la formation d’un gouvernement d’union nationale. La préparation de la feuille de route supposait la mise à l’ordre du jour du débat entre les acteurs et pourquoi pas un cheminement vers la démocratie participative ! De fait, le débat se déplace entre partisans et opposants du système des quotas, alors que le nouveau Chef du gouvernement souhaitait former un gouvernement basé sur la compétence et la conformité à l’Accord de Carthage.
En dépit des effets d’annonce, les négociations ont mis à l’ordre du jour le partage du butin, en application des résultats électoraux. En fait, le processus de négociations a finalement opté pour un système de quotas, entre les acteurs. Tel est le souhait des partis vainqueurs des élections de 2014, c’est du moins ce qu’affirment une bonne partie de leurs membres. Ennahdha, devenue le premier parti, au sein du parlement, depuis la sécession des députés, qui contestent la nouvelle direction de Nida, se considère sous-représentée par la formation proposée par le nouveau Chef du gouvernement. Elle considère, selon la rumeur publique, exprimée sur Facebook, que le ministère des Affaires étrangères, charge régalienne, devrait revenir à un indépendant et aurait même fait valoir ses vues sur certains ministères. Attitude contestataire de l’UPL : son président Slim Riahi aurait déclaré, sur sa page officielle Facebook que : “L’UPL ne sera pas témoin de la formation d’un gouvernement dont le pourcentage de l’échec est plus élevé que celui de la réussite”. Il a souligné que “l’UPL ne peut se contenter de détenir des portefeuilles sans faire partie de la décision politique, portant sur des dossiers réels touchant directement le peuple” (TAP; 18 août 2016).
En fait, il s’agit de manœuvres, de pressions pour réexaminer la répartition des ministères. Les quatre partis de la coalition sont condamnés à s’entendre. Fait significatif, les Destouriens qui ont pu conjurer leur disparition, comme force politique d’avenir, préparent leur entrée au gouvernement. Est-ce à dire que l’appartenance au libéralisme économique détermine les alliances ? Al-Machrouû échappe néanmoins à la règle. Son opposition à l’actuelle direction de Nida l’empêcherait de rejoindre l’alliance conjoncturelle.
Mais ne perdons pas de vue que “la démocratie devient un spectacle, avec ses acteurs, ses récits et ses intrigues installés sur le devant de la scène, pendant que l’essentiel se déroule en coulisses” (Yves Sintomer). Dans le cas actuel, le compromis, entre les demandes sociales, ferait valoir les rapports de force entre les acteurs. Pouvait-il ignorer des pressions de l’extérieur, alors que le pays est à la recherche de l’investissement, pour assurer la relance économique ?