L’économiste Ezzedine Saidane donne son éclairage sur la possibilité d’imposer des mesures d’austérité pour les lecteurs de leconomistemaghrebin.com.
En effet, Ezzedine Saidane a commencé son analyse en rappelant que la Tunisie vit une crise économique aiguë. D’ailleurs pour lui, la crise n’est pas seulement économique, elle est économique et financière à la fois. Cela est dû au fait que le pays passe par une situation de récession. : « Une économie en situation de récession ne crée pas de croissance, la preuve que nous sommes en train de réaliser de taux faible de croissance comme 0,4% de croissance », argumente-t-il.
Et de continuer : « C’est même une croissance artificielle puisqu’elle provient essentiellement des augmentations salariales octryées à la fonction publiques. De même une économie en récession ne crée pas d’emploi la preuve que le taux de chômage est en train d’augmenter ».
Une économie en récession ne crée pas de richesse additionnelle : « Quand on évoque le terme richesse additionnelle on pense à la capacité du pays à faire face à ses engagements financiers interne et externes ».
En ce qui concerne la crise financière grave, elle a plusieurs aspects. Pour n’évoquer que deux aspects. Le premier est relatif aux finances publiques autrement dit le budget de l’Etat « qui est dans une situation extrêmement inquiétante : « On est à la fin du mois d’août et nous n’avons pas toujours bouclé le budget de 2016, en termes de recette. », avertit-il.
Cette situation aura pour conséquences, d’après l’économiste, de recourir à une loi de finances complémentaire, ce qui réduit encore plus la crédibilité de la loi de finances qui est supposé refléter la politique du gouvernement. A cet égard, notre interlocuteur a rappelé que depuis 2011 jusqu’à aujourd’hui nous avons eu recours à des lois de finances complémentaires.
« Donc on est en train de s’habituer à considérer les chiffres des lois de finances comme étantdes chiffres provisoires ». Le deuxième aspect est relatif à la question suivante : « Comment allons-nous concevoir la politique de 2017 ? »
« C’est un langage politique !! », nous dit l’économiste en commentant le fait de recourir aux mesures d’austérité en 2017, si les choses ne s’améliorent pas en 2016. « Le langage vrai, c’est que nous serons contraints d’appliquer les mesures d’austérité » explique-t-il.
Etayant son argumentaire, l’économiste a indiqué que 2016 est sur le point de s’achever et que le gouvernement ne trouvera pas le temps pour agir et engager des réformes et d’en tirer les fruits : « Pour ceux qui savent décoder les messages, le choix est déjà fait pour la politique d’austérité », indique-t-il.
Ainsi la politique d’austérité peut être mise en place de deux manières. La première, d’après Ezzeddine Saidane, est une politique qui se base sur la rationalisation des dépenses publiques. « D’ailleurs concernant les dépenses publiques, l’austérité est conseillée de tout temps et pas uniquement en temps de crise », avance-t-il.
Par contre, ce que l’on a omis de dire est que l’austérité signifie le licenciement de milliers de fonctionnaires, une réduction drastique des dépenses de santé, des investissements publics dans le domaine de l’infrastructure et augmentation de l’impôt. Pour notre invité les expériences d’autres pays ont montré qu’une politique de ce genre-là a deux conséquences : l’aggravation de la crise et la détérioration de la classe pauvre et la classe moyenne car elles sont concernées directement par les mesures précitées.
Pour Ezzedine Saidane : « On devrait plutôt opter pour une politique d’austérité au niveau des dépenses publiques ».
Et de conclure : « Aujourd’hui, nous faisons face à un grave problème. Pour obtenir le dernier crédit du FMI, l’Etat tunisien s’est engagé à maintenir la masse salariale dans le secteur public à un maximum de 13,3% du PIB. Aujourd’hui nous en sommes à 15%. Donc nos engagement ne sont pas respectés. Par conséquent, nous risquons un étouffement financier extrêmement grave parce que si le FMI ne débloque pas les sommes promises, nous nous retrouverons dans la position inconfortable de ne pas pouvoir rembourser nos dettes ».
Il a rappelé dans le même contexte que le taux d’endettement est de 62% qui est très élevé dans une économie qui fonctionne mal et que le pays va se trouver dans une logique de rééchelonnement des dettes.