Le gouvernement Chahed d’union nationale n’a pas le vent en poupe : grèves, sit-in, barrage de routes et plein de chantiers hérités des gouvernements précédents attendent solution désespérément. Les mouvements sociaux sont au rendez-vous…
Le gouvernement Chahed a obtenu la confiance de l’Assemblée des représentants du peuple en date du 26 août. A peine a-t-il commencé à travailler que les revendications ont surgi : la protestation à Fernana dans le gouvernorat de Jendouba suite à l’immolation d’un jeune et la pénurie d’eau entre autres, le blocage du site de Petrofac de Kerkennah et une grève générale qui se dessine à l’horizon dans le gouvernorat de Tataouine, ainsi que la crise perpétuelle du phosphate dans le bassin minier.
L’appui parlementaire dont le gouvernement dispose demeure inefficace devant la multiplication des grèves et des malaises sociaux.
Une chose est sûre : les protestations n’épargnent aucun gouvernement, notamment après le 14 janvier 2011. Rappelons que dès son accès au pouvoir, le gouvernement s’est trouvé face à un déluge de protestations sociales de toutes parts, notamment celles de Kasserine. Ainsi deux questions peuvent être posées : un gouvernement, au-delà de sa composition, comment peut-il être efficace en travaillant dans un contexte pareil? Le déclenchement des protestations à quelques jours de la prise de fonction du nouveau gouvernement est-il une coïncidence?
Catégorique, le député du Front Populaire Hammami Jilani n’impute pas le retour des mouvements protestataires à la mise en place du gouvernement Chahed. D’ailleurs pour lui ces mouvements n’ont pas cessé pour parler d’un retour. « Les attentes des gens sont considérables et aucun gouvernement de l’après 14 janvier n’a donné un signe positif à ces citoyens qui n’en finissent pas de protester », estime-t-il. Ainsi la déception des Tunisiens se traduit par les protestations, que ce soit face à un gouvernement ou un autre.
« Pendant la période du gouvernement Habib Essid, les grèves n’ont pas été suspendues; mais en ce qui concerne le gouvernement Youssef Chahed, s’il ne donne pas les garanties qu’attendent les protestataires des régions laissées-pour-compte, les mouvements de protestation iront crescendo, surtout qu’il s’agit de revendications plus que légitimes, outre l’emploi et la question sensible de l’eau », ajoute-t-il.
Dans le même sillage, Salem Ayari, le président de l’Union des diplômés chômeurs s’exprime. Pour ce jeune secrétaire général de l’organisme qui encadre les mouvements des diplômés chômeurs et négocie avec le gouvernement en temps de crise, le recours à la grève et aux sit-in ne doit se faire qu’après épuisement de toutes les concertations et de toutes les négociations à caractère pacifique. « En ce qui nous concerne, peu nous importe la composition du gouvernement, après tout il a eu la confiance de l’Assemblée des représentants du peuple, ce qui nous intéresse c’est la manière dont sont traitées nos revendications », explique-t-il. Le pire est à craindre d’après Salem Ayari, surtout que « le gouvernement Chahed fait la sourde oreille aux revendications sociales », conclut-il
Sana Mersni, députée du Mouvement Ennahdha à l’Assemblée des Représentants du peuple, estime que le gouvernement Chahed doit relever le défi de la réalisation des revendications sociales, notamment dans les régions défavorisées et assurer la paix sociale : « Avec la menace terroriste et la montée des mouvements sociaux, les choses ne peuvent aller dans la bonne direction », estime-t-elle.
Le député du bloc parlementaire Al-Horra, Souhail Alouini, quant à lui, s’est contenté de dire que : « Les mouvements sociaux qui se passent actuellement sont une manière de perturber l’action du gouvernement actuel pour qu’il ne puisse pas avancer. Ce serait des actions plus politisées que syndicales. »
J’ajoute que ces troubles, souvent « téléguidés » peuvent être le résultat de « manipulations » en vue de déstabiliser tel ou tel secteur économique pour qu’il puisse être repris à vil prix par des vautours de la finance.
Ces mêmes vautours, rois des marchés parallèles, de la contrebande et dont l’une des spécialité est la « vitale » importation de glibettes, sont justement secondés par ceux qui prônent de « relever le défi de la réalisation des revendications sociales » en agitant le spectre de la peur, du genre : « Avec la menace terroriste et la montée des mouvements sociaux, les choses ne peuvent aller dans la bonne direction »…