«La loi de finances 2017: quels enjeux pour l’entreprise ?», tel est le thème du débat organisé ce matin par la Chambre tuniso-française de commerce et d’industrie (CTFCI) et animé par Sihem Nemsia, directrice générale des études et de la législation fiscale au ministère des Finances, en présence du président de la CTFCI, Foued Lakhoua, des chefs d’entreprise, des experts et des représentants des médias.
A l’ouverture du débat, M. Lakhoua a annoncé que la LF 2017 constituera le premier jalon pour favoriser la relance économique, consacrer la justice et l’équité fiscales et garantir la pérennité et la soutenabilité des finances publiques.
Et d’ajouter que cette loi s’inscrit dans une démarche mesurée qui consiste à ne pas réduire fortement les dépenses ni augmenter fortement les impositions en tentant de donner plus de visibilité à moyen terme incertain. Pour cette raison, elle a, selon ses dires, le mérite de tenter d’apporter des éléments de réponse en portant plutôt sur la nécessité de contenir le budget pour ne pas menacer l’avenir.
Une série d’interrogations se posent, à savoir : pour des entreprises organisées, dans quelle mesure la LF 2017 pourrait-elle consacrer plus d’équité fiscale au moment où des pans entiers restent en dehors du système ? Comment expliquer le maintien du taux d’imposition additionnel ( dit aussi exceptionnel) sur les résultats des sociétés et les droits d’enregistrement complémentaires sur les grandes acquisitions immobilières ? Quel objectif se cache derrière l’obligation faite à tous les opérateurs économiques, dont les professions économiques, d’avoir un identifiant fiscal ? Quelles sont les dispositions qui ont été définies pour lutter contre l’évasion fiscale et quelle serait leur réelle portée ?
En réponse à ces interrogations, Mme. Nemsia a précisé tout d’abord que la LF 2017 a été axée sur la récupération du modèle de croissance par la relance de l’investissement et l’encouragement de l’initiative privée, la répartition de la charge fiscale entre tous les contribuables, la lutte contre l’évasion fiscale et le renforcement des garanties des contribuables, l’amélioration du recouvrement et le renforcement des recettes budgétaires ainsi que sur des mesures à caractère social.
Mesures de la LF 2017
Ainsi, elle est revenue sur les principales mesures intégrées dans cette LF en ce qui concerne les entreprises : parmi les mesures adoptées dans la LF 2017, figure l’article 12 qui prévoit l’encouragement des entreprises à l’admission de leurs actions à la Bourse, et ce, à travers la réduction du taux de l’impôt sur les sociétés à 15% pendant cinq ans. Cette réduction cible principalement les sociétés soumises à l’IS au taux de 25% et qui procèdent à l’admission de leurs actions ordinaires à la cote de la Bourse de Tunis à compter du 1er janvier 2017 jusqu’ au 31 décembre 2019.
L’article 13 prévoit le relèvement du montant des intérêts des comptes spéciaux d’épargne et des intérêts des emprunts obligataires déductibles de l’assiette de l’IR, de 1500 DT à 5000 DT sans que ce montant n’excède 3000 DT pour les intérêts provenant des comptes spéciaux d’épargne ouverts auprès des banques et auprès de la Caisse d’Epargne Nationale de Tunisie.
L’article 14 prévoit de son côté l’allégement de la charge fiscale des personnes physiques à faible revenu et le renforcement de l’équité fiscale, et ce, par le biais de la généralisation de l’exonération du revenu annuel qui n’excède pas 5000 DT pour couvrir tous les contribuables en fixant la première tranche de revenu exonérée du barème à 5,000DT et par la redistribution des autres tranches avec l’ajustement des taux d’imposition, la rationalisation de la déduction des frais professionnels pour les salariés fixés à 10% en fixant un plafond de déduction à 2000 DT, ainsi que par la soumission à une retenue du montant net au taux de 20 % seulement lorsque le salaire annuel global net dépasse 5.000 DT
Les articles de 16 à 23 envisagent la réduction des exonérations de la TVA de certains produits et services et leur soumission au taux de 6 % pour certains produits, de 18 % pour des opérations de vente de terrains effectuées par les promoteurs immobiliers et soumission à la TVA de quelques entreprises publiques exonérées.
En ce qui concerne les articles de 24 à 28, ils envisagent la révision des taux de la TVA appliqués à quelques secteurs dans le but de réduire la liste des produits et services soumis au taux de 12%, et ce, par la réduction du taux de 12 à 6% pour certains secteurs, l’augmentation du taux de 12 à 18% pour d’autres, ainsi que par le maintien du taux de 12 % pour certains secteurs.
L’article 29 prévoit l’instauration d’un droit d’enregistrement complémentaire sur les ventes et les donations des immeubles pour certaines opérations. Sachant que ce droit est ajouté aux autres droits d’enregistrement exigibles conformément à la législation en vigueur, et il est liquidé sur la valeur totale de l’immeuble objet de la vente ou de la donation avec exonération d’impôt au profit de certaines opérations.
Quant aux professions libérales, les articles 31 et 32 prévoient l’amélioration du recouvrement de l’impôt dû par ces professions, et ce, par l’obligation de mentionner le matricule fiscal sur tout document émis ou utilisé par les personnes exerçant une profession libérale (architecte, expert-comptable, avocat, médecin…). Sachant que le manquement à cette obligation est sanctionné par une amende fiscale allant de 250 DT à 10.000 DT. Cette mesure s’applique à partir de 1er avril 2017.
Afin de renforcer les efforts de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale, l’article 33 envisage la création d’une brigade des investigations et de lutte contre l’évasion fiscale.
Toutefois, l’article 40 prévoit l’évaluation forfaitaire des revenus des contribuables dans le cadre des opérations de vérification préliminaire par l’habilitation de l’administration fiscale, dans le cadre d’une vérification préliminaire et l’instauration de l’obligation de dépôt de la liasse fiscale unique pour les personnes morales soumises à l’IS, les sociétés de personnes et assimilées et les personnes physiques soumises à l’IRPP selon le régime réel.
Au final, les articles de 48 à 51 envisagent l’institution d’une contribution conjoncturelle exceptionnelle de 7,5% au profit du budget de l’Etat pour l’année 2017 pour les entreprises et sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés ainsi que celles qui en sont exonérées, et aux personnes physiques de nationalité tunisienne soumises à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices des professions non commerciales, des bénéfices des exploitations agricoles et de pêche et des revenus fonciers ainsi que celles qui en sont exonérées. Cette contribution conjoncturelle demeure optionnelle pour les autres personnes.
Sont déductibles de la base de la contribution conjoncturelle, les bénéfices réinvestis exclusivement au sein des sociétés qui respectent les conditions prévues par la législation fiscale en vigueur, et ce, dans la limite de 50% de la base de ladite contribution. Ladite déduction n’est accordée qu’aux sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés au taux de 25%.
Egalement, la contribution conjoncturelle n’est pas déductible de l’assiette de l’impôt sur le revenu des personnes physiques ou de l’impôt sur les sociétés ou de l’impôt pétrolier.