Dans l’objectif de moderniser l’économie, la réforme administrative constitue la locomotive des réformes à entreprendre. En effet, nulle autre réforme ne pourrait être pensée ni adoptée avant que la réforme administrative ne commence à prendre effet. De même, afin de mettre en place de nouvelles politiques publiques et instaurer l’approche participative, il faudrait également passer par la réforme administrative. Il s’agit de la réforme la plus attendue et la plus sollicitée tant elle touche à toutes les parties prenantes et tant son application permettra de résoudre des problématiques afférentes autant au secteur privé qu’à celui public.
C’est pourquoi, la troisième édition du Tunisia Economic Forum, prévue pour le 6 avril prochain à Tunis et organisée par l’IACE, se focalisera sur l’administration publique, premier acteur concerné par l’adoption des réformes, de l’application des politiques publiques et le mécanisme via lequel l’Etat fonctionne.
La Tunisie vit un contexte économique difficile depuis maintenant plus de six ans, la croissance économique va de mal en pis et les investissements ont du mal à décoller, en attendant la concrétisation des promesses d’investissement collectées à la conférence Tunisia 2020 tenue au mois de novembre 2016 .
Sachant que l’un des obstacles majeurs à l’investissement est bien la lenteur des procédures administratives et leur complexité, la concrétisation dudit investissement ne pourra avoir lieu autrement. Une administration qui depuis très longtemps ne s’est pas renouvelée et n’a pas actualisé son mode de fonctionnement à l’ère de la digitalisation.
Il est, ainsi, primordial que la réforme de l’administration soit adoptée. Il s’agit de la condition sine qua non pour que l’économie se redynamise. La transition économique ne prendra effet qu’à travers l’adoption des réformes administratives.
Constatons, de prime abord, que la rémunération dans le secteur public représente un poids très important dans le budget de l’Etat ; il serait, ainsi, opportun de se poser la question de la performance de l’administration tant elle pèse en termes de ressources.
Qu’en est-il de la valeur ajoutée créée par cette administration, et quel serait le moyen d’évaluer sa contribution dans l’économie tunisienne, à part celui de la proportion des salaires publics dans le PIB ?
D’autre part, l’expérience internationale a prouvé que l’administration devrait être constituée majoritairement de métiers techniques et ne doit plus être focalisée sur les métiers de support veillant au respect des procédures et des lois en vigueur. Est-ce que la Tunisie dispose de compétences lui permettant de se mesurer à d’autres économies dans le monde ?
Le benchmark international permettra de nous situer à ce niveau et le premier panel du forum permettra effectivement de débattre de la « mesure de la performance de l’administration publique ».
La réorganisation de l’administration, le basculement du mode de gestion par fonction au mode de gestion par métier et la mise en place d’un nouveau système de rémunération capable d’attirer et retenir les compétences sont tous des défis de premier plan que l’administration n’a pas encore su relever. Il est, aussi, à noter que l’administration, dans sa conception actuelle va à l’encontre du concept organisationnel tel qu’adopté par toutes les économies du monde, à savoir la gestion suivant les chaînes de valeur. Cette problématique, sera traitée dans le cadre du second panel sur « La gestion de l’administration : réaffectation des ressources et motivation des managers ».
La relation entre le gouvernement et l’administration est une question de première importance. En effet, il est de plus en plus question de séparation entre la conception des politiques publiques et l’opérationnalisation de ces politiques. Le rôle et les prérogatives de la haute fonction publique devront être au cœur du débat.
A quel point l’autorité ministérielle de tutelle devrait être impliquée dans l’adoption de décisions à l’échelle de chaque ministère ? Quel est le rôle du directeur général et quelles attributions à chaque direction relevant des différents ministères ?
Toutes ces questions pourront être débattues dans le cadre du troisième panel sur le thème «Pour une nouvelle relation gouvernement- administration ».
De même, l’administration tunisienne dispose de multiples établissements publics allant des entreprises publiques aux offices et aux caisses. Cette pléthore d’institutions peut porter à confusion et compliquer le mode d’adoption des réformes. La question du mode de gouvernance est ainsi soulevée, la raison d’être de ces établissements de même que leur mode de fonctionnement est à interroger surtout qu’il pourrait y avoir chevauchement entre les missions et les attributions de chaque institution. Cette problématique sera traitée dans le cadre du quatrième panel sur le thème : « Pour une meilleure gestion des entreprises publiques ».
En outre, la Tunisie a, depuis l’émergence de la deuxième République, adopté deux principes fondamentaux à travers la nouvelle Constitution, à savoir l’indépendance de l’administration et la décentralisation.
Des questions se posent donc sur la relation entre l’administration centrale (ministères) et le gouvernement dont le ministre reste le chef et détenant le pouvoir de nomination, d’affectation et de promotion.
Quelle relation pourrait lier l’administration locale et centrale ? Mais aussi quelle relation entre l’administration locale et les nouvelles autorités locales ? Les organisateurs tenteront de répondre à ces questions dans le cadre du cinquième panel sur le thème : « Pour une administration décentralisée et performante ».
Notons que Tunisia Economic Forum est un événement international qui réunit, chaque année, experts, économistes, chefs d’entreprise, politiciens, acteurs de la société civile et des organisations internationales autour d’une problématique au cœur des préoccupations économiques et politiques.