Selon le Rapport de suivi de la situation économique dans la Région MENA intitulé « Perspectives régionales et économie de la reconstruction d’après-guerre », publié hier par la Banque Mondiale (BM), afin d’exposer les difficultés économiques auxquelles les pays de la région sont confrontés ainsi que leurs perspectives macroéconomiques à court terme, la Tunisie avance à grands pas dans son programme de transition politique, mais les résultats concrets sur le plan économique prennent plus de temps que prévu, la croissance étant trop faible pour peser réellement sur le chômage dans un contexte d’élargissement du déficit budgétaire ainsi que du déficit du compte courant.
Rappelant les indicateurs récents, le rapport a démontré que le taux de croissance annuelle de l’économie tunisienne a été estimé à 1% en 2016 (2% hors agriculture et pêche), contre 1,1 % en 2015 (0,1 % hors agriculture). Cette croissance a été essentiellement tirée par les services marchands et le secteur des activités non marchandes, qui ont respectivement progressé de 2,7 %, ainsi que par l’industrie manufacturière (+0,9 %).
Ainsi, la Tunisie a été confrontée à d’énormes déficits budgétaire et extérieur. D’ailleurs, le déficit budgétaire hors dons a atteint 6 % du PIB en 2016, contre 5,6 % en 2015. Le ratio d’endettement est passé de 55,4 % en 2015 à 61,8 % du PIB en 2016. Et le déficit du compte courant est resté élevé en 2016, à 9 % du PIB.
Face à cette situation, le gouvernement d’unité nationale s’est donné pour priorités de renforcer la sécurité, d’améliorer le cadre de l’activité économique, d’assurer la stabilité macroéconomique et budgétaire et de relancer la croissance.
Perspectives
La BM projette, selon son dernier rapport, une accélération de la croissance économique à 2,3 % en 2017, du fait de la reprise dans les secteurs stratégiques de l’agriculture, du phosphate et de l’industrie manufacturière.
A moyen terme, la croissance devrait remonter progressivement à 2,8 % en 2018 et 3,2 % en 2019, et ce, en raison d’une amélioration du climat des affaires associée à des réformes structurelles et au renforcement de la stabilité sociale et de la sécurité.
Pour le déficit budgétaire, il devrait rester élevé, à 5,9% du PIB en 2017. Pour assurer la viabilité des finances publiques, la BM a précisé qu’il faudra contenir la masse salariale de l’État et élargir l’assiette fiscale, puis créer de l’espace pour accroître les dépenses d’investissement.
Sur le plan extérieur, le déficit courant devrait se resserrer légèrement à 8,4 % du PIB, sous l’effet de la relance progressive des secteurs manufacturier et minier, et du rebond des exportations des produits agricoles et des services.
A moyen terme, le compte courant pourrait profiter du redressement graduel du secteur industriel et du commerce des services, et diminuer peu à peu jusqu’à la fin de la période considérée.
Risques et défis
Les principaux risques qui pèsent sur les perspectives économiques demeurent le niveau élevé du chômage des jeunes et le malaise social, ainsi que la fragilité de la situation sécuritaire aux niveaux national et régional.
Certes, le gouvernement déploie des ressources pour améliorer la sécurité, mais il doit également engager des réformes pour stimuler la croissance du secteur privé et la création d’emplois afin d’écarter durablement ces risques.
A cet égard, la BM a dévoilé qu’il importe essentiellement d’adopter et d’appliquer des réglementations qui améliorent les conditions d’accès aux marchés et donnent concrètement suite à la Conférence internationale sur l’investissement « Tunisia 2020 », d’élaborer et d’appliquer une stratégie globale de réforme de la fonction publique et des entreprises à capitaux publics, d’améliorer la gouvernance, notamment la lutte contre la corruption et la mainmise des élites et d’instaurer un dialogue en vue de déterminer les origines du malaise social et d’y apporter des solutions, en particulier avec les syndicats.