Interpellé sur la dévaluation record du dinar tunisien, Moez Joudi, Président de l’Association tunisienne de la gouvernance (ATG), a affirmé qu’il faut d’abord clarifier et corriger certaines fausses idées.
Ainsi, les décisions de la dévaluation du dinar n’existent plus en Tunisie depuis des années. M. Joudi rappelle qu’on a changé notre régime de change et que ce n’est plus un régime à taux fixes. De ce fait, le dinar ne se dévalue plus suite à une décision du gouvernement ou de la Banque centrale de Tunisie (BCT). Ce sont les opérateurs économiques et le marché qui décident du cours journalier, reflétant ainsi la situation économique du pays et sa compétitivité sur le plan international.
Par ailleurs, la BCT n’intervient qu’au niveau de la régulation du cours du dinar et à travers les mécanismes des réserves de change. En l’occurrence, la BCT pourrait se mettre à acheter le dinar par des devises, quand il suit une courbe baissière alarmante.
C’est cette intervention qui est, selon ses dires, remise en cause que ce soit par les nouveaux statuts de la BCT prônant plus d’indépendance de cette institution de régulation bancaire et financière, ou suivant le faible niveau relatif des réserves en devises (104 jours actuellement), que par les dernières recommandations du Fonds Monétaire International (FMI).
Donc, le glissement du dinar est en train de se produire d’une manière conséquente depuis 2012/2013. Il se poursuit et ne fait que refléter la dégradation de la situation économique et financière de la Tunisie, ainsi que le déséquilibre de la balance commerciale, le manque de compétitivité de nos produits et la faiblesse des IDE.
Ce glissement a été de plus soutenu à cause des déclarations de la ministre des Finances Lamia Zribi qui a jeté de l’huile sur le feu et qui n’aurait pas dû intervenir de la sorte.
De ce fait, M. Joudi a déclaré qu’il ne faut pas banaliser ou relativiser la situation. Le gouvernement est appelé plutôt à être plus réactif en termes de plan de sauvetage et de relance économique. «Il est anormal que la navigation se fasse à vue et qu’il n’y ait pas vraiment une feuille de route bien tracée et suivie par les autorités.»
Ainsi, il faut mettre en place des mesures à long terme, issues d’un vrai dialogue économique national, et des mesures à court terme, (Quick Wins) capables de stopper l’hémorragie.
En l’occurrence, il faut maîtriser le déficit commercial en limitant les importations et en encadrant les exportations. Il faut également, lutter contre l’économie parallèle et appuyer nos entreprises, notamment exportatrices, pour qu’elles soient plus compétitives et travailler sur la confiance qui doit revenir chez les opérateurs.
En outre, l’Etat doit absolument « donner le la », en adoptant une politique de grands projets et en activant l’investissement public, pour que l’investissement privé puisse réagir en conséquence. Il doit de même accélérer le rythme des réformes, notamment les réformes bancaire, financière et fiscale de l’administration publique et des caisses de sécurité sociale.
Dans le même sillage, Moez Joudi a souligné qu’il importe que l’ARP puisse assumer sa responsabilité et accélérer le vote des lois importantes dans le dispositif économique, notamment la loi d’urgence économique qui est capable d’accélérer l’investissement public et la loi sur la réconciliation économique qui a pour principal objectif de permettre aux fonctionnaires et hauts cadres de l’Etat, ainsi qu’aux opérateurs économiques de retrouver un niveau de confiance et d’assurance pour pouvoir avancer et contribuer à améliorer le climat des affaires et investir dans le pays.