Cela fait des mois, voire deux années qu’on parle du projet de loi relatif à la réconciliation économique. Au final après une série interminable de discussions, quel en est l’enjeu principal ?
C’est lors d’un colloque organisé par Nidaa Tounes sur la réconciliation économique que sera débattu le coût de la non-réconciliation et bien évidemment celui de la réconciliation.
Slim Azzabi, directeur du cabinet présidentiel, a souligné: « Nous sommes toujours au stade des discussions parlementaires.C’est la volonté du Président de la République de ne pas faire un passage en force bien que l’article 62 de la Constitution prévoie que les projets de loi proposés par le Président de la République ont la priorité. Le Président a voulu à ce qu’il y ait un débat large, à savoir ouvrir cette question aux partis politiques, aux médias à l’ensemble de la société civile ».
D’après lui, ce qui ressort de ces projets, ce sont les remarques apportées aussi bien sur le plan technique que politique. De ce fait, M. Azzabi précise: « Cela nous a aussi permis d’améliorer et d’apporter des modifications qui peuvent amener plus de crédibilité, plus de transparence et effacer toutes les zones d’ombre. »
Aujourd’hui, y a-t-il un coût de la non-réconciliation économique?
Sur cette interrogation, il a répondu: « On le voit bien dans les régions. Aujourd’hui, la moyenne des décaissements des fonds publics alloués aux régions n’a pas dépassé, entre 2011 et 2015, 35%. Cela veut dire que 65% des fonds mis à disposition des régions ( construction des écoles, infrastructure) sont encore disponibles. Aujourd’hui, les responsables locaux et régionaux ont des craintes. Nous voyons aussi que les banques publiques ne sont plus enclines à jouer leur rôle, à savoir encourager l’investissement dans ces régions. Nous avons une estimation de l’IACE qui dit que cette loi peut amener 1.2 de croissance par an puisque les fonds seront alloués exclusivement au développement des régions”.
Parler de réconciliation entre qui et qui? Rencontré lors du débat, Nizar Ayed a souligné: “Pour le moment ceux qui sont concernés sont les fonctionnaires de l’Etat qui ne sont pas accusés de détournement de fonds publics et les hommes d’affaires détenteurs de comptes à l’étranger d’une manière illégale”.
De son côté, Mohsen Hassen, membre du parti Nidaa Tounes, a mis l’accent sur l’importance d’établir une vraie réconciliation. Il déclare : « Nous avons vraiment besoin d’une réconciliation économique, politique et sociale. » Il ajoute: »C’est le moment où jamais de pousser en avant ce projet pour assainir l’environnement des affaires, aider les investisseurs à créer de la richesse. Cette réconciliation économique permettra de mettre fin à l’impunité et au phénomène de la corruption. Il s’agit d’une nouvelle étape à franchir ».
La plupart des experts présents estiment que le coût de la non – réconciliation s’élève à 1.2% taux de croissance. Cela signifie la création de 18 000 postes d’emploi. Cependant, personne n’a pu évoquer, en revanche, le coût de la réconciliation.
Par ailleurs, Mourad Dellech, président de la commission juridique du parti Nidaa tounes, précise qu’une fois que le projet de loi sur la réconciliation passera à l’ARP, une commission indépendante du pouvoir exécutif sera créée qui octroiera un délai de 9 mois aux personnes concernées pour déposer leur demande d’amnistie. Passé ce délai, ces dernières encourront des poursuites judiciaires. Il conclut: « Ce mécanisme encourage le retour de la confiance. La justice transitionnelle est le mal nécessaire de toutes les transitions démocratiques mais il n’y a pas qu’un seul mécanisme de justice transitionnelle ».