Dans le cadre des efforts déployés pour lutter contre la contrebande et le marché parallèle, la CONECT et l’Instance nationale de lutte contre la corruption ont organisé, aujourd’hui, une conférence sur le thème : «Le secteur informel transfrontalier: ampleur et impact sur l’économie tunisienne», et ce, en présence de Tarak Chérif, Président de la Confédération, Chawki Tabib, Président de l’Instance, Lotfi Ayadi, consultant auprès de la BM, Radouane Erguez, représentant l’association Joussour, ainsi que des experts éminents et des représentants des médias.
Le phénomène du marché parallèle et de la contrebande a connu, depuis 2011, une ampleur sans précédent profitant de l’instabilité du pays, du manque de réactivité des autorités concernées et de l’absence de mesures adéquates et efficaces pour contrer son expansion.
Du coup, c’est l’ensemble des secteurs et des régions qui sont touchés avec des conséquences néfastes, allant même jusqu’à la destruction de l’économie et la désindustrialisation de nombreuses régions du pays.
Plusieurs études ont été effectuées autour de ce sujet afin d’estimer l’ampleur et l’impact sur l’économie tunisienne, telle que l’étude de la Banque mondiale en 2014 qui a évalué le volume du commerce informel transfrontalier à 1800 millions de dinars et une perte de recette pour l’Etat évaluée à 1200 millions de dinars.
Dans ce sens, Tarek Cherif a annoncé que le marché parallèle, qui représente environ 54% du PIB tunisien, constitue un grave fléau qui échappe aux autorités et engendre de très grandes pertes en recettes fiscales pour l’Etat tunisien.
Il nuit à l’entreprise, notamment du secteur privé, et aux secteurs structurés avec un impact direct sur l’emploi, le développement et l’investissement. Et il met à mal, par conséquent, l’évolution de la croissance économique.
Pour y remédier, il importe de déployer les efforts pour mettre en œuvre des mesures et des actions urgentes et courageuses, afin de passer de l’informel au formel, relancer la croissance économique, booster l’investissement et créer de l’emploi formel d’une part, et d’éviter les risques qu’on peut connaître dans l’avenir d’autre part.
Dans le même sillage, Chawki Tabib a affirmé que le secteur informel a touché énormément le tissu industriel et tous les secteurs d’activité, à savoir le secteur bancaire, santé, agriculture, fiscalité, douane, emploi, sécurité, etc.
Il est temps, de ce fait, de tirer la sonnette d’alarme pour contrecarrer ce secteur qui constitue un grand danger pour l’économie nationale.
En chiffres, M. Tabib a annoncé que ce secteur engendre des manques à gagner pour l’Etat estimés à 1000 millions de dinars pour le secteur du tabac, 200 millions de dinars pour la douane, 800 millions de dinars pour les subventions des produits de consommation de base, etc.
Face à ces indicateurs alarmants, il a préconisé de déployer tous les efforts nécessaires qui exigent une volonté politique, afin de mettre en place une base de données, consacrer une entreprise publique pour étudier ce phénomène et collecter toutes les données, créer une chambre d’opérations mixte…
Pour conclure, il n’a pas manqué de déclarer que l’ampleur prise par ce secteur est due entre autres au soutien de certaines parties au sein de l’Etat, ce qui impose des mesures et des solutions urgentes.
Lotfi Ayadi a, pour sa part, recommandé de maintenir et continuer la baisse de la pression fiscale à l’importation dans le cadre de la réforme tarifaire, diminuer les obstacles aux importations, mener des études sectorielles notamment pour les secteurs les plus touchés dont le tabac et le carburant, accélérer la révision du code des changes, faciliter les procédures administratives, notamment celles de dédouanement, appliquer la stratégie nationale de lutte contre la corruption, développer les régions frontalières à travers l’instauration d’un plan de développement urgent et d’établir une veille frontalière pour réagir en temps opportun à tout phénomène nouveau.
Il a également recommandé de ne jamais avoir recours à la création d’une zone franche qui va constituer, selon ses propos, plus de danger pour l’économie nationale.
Estimation du volume du commerce informel transfrontalier
Le total du commerce informel transfrontalier représente environ 6000 millions de dinars (MDT) en 2016, répartis comme suit :
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Carburant: 1000 MDT
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Tabac: 1000 MDT
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Marchandises diverses: 2000 MDT à travers les frontières terrestres et 2000 MDT à travers autres sources d’approvisionnement.