Le dinar tunisien connait une dépréciation relativement importante depuis quelques semaines, suscitant des inquiétudes au niveau des différents acteurs économiques. Toutefois, lorsqu’on compare ce qui se passe sur le marché tunisien par rapport à d’autres marchés de pays émergents, on s’aperçoit que cette dépréciation est relativement faible, et que la volatilité du dinar est également très limitée.
L’analyse ci-dessous permet de prendre du recul par rapport à ces évolutions et de tirer quelques leçons pour notre devise.
Le graphe 1 montre l’évolution de quelques devises émergentes par rapport au dollar américain en prenant comme base 100 le 1/1/2007 pour chaque devise, soit un historique d’évolution sur 10 ans. L’échantillon regroupe à la fois de grands pays émergents comme le Brésil, la Turquie, la Russie et l’Afrique du Sud, mais aussi des pays comparables à la Tunisie, comme le Maroc et l’Egypte.
Tous les pays de l’échantillon, et quelque soit leur taille, affichent des devises en dépréciation. Seuls 2 pays voient leur devise se déprécier moins que le dinar: le Maroc (panier indexé sur l’euro et le dollar, et bientôt libéralisé), et le Brésil (dont le Real s’est fortement apprécié jusqu’à 2012 puis a chuté de plus de 40% en 4 ans, impliquant ainsi une forte volatilité).
La dépréciation de ces devises peut être ralentie par l’intervention des banques centrales qui peuvent choisir de soutenir leur monnaie en puisant sur leurs réserves de changes. Mais ce n’est pas la politique suivie par tous les pays.
En effet on trouve:
• des pays qui ont fait le choix de laisser leur monnaie se déprécier en préservant leurs réserves de change comme la Turquie, le Brésil et l’Afrique du Sud. Ceci a permis à ces pays d’améliorer la compétitivité de leur économie locale et encourager ainsi les exportations et freiner les importations.
• d’autres pays ont essayé de ralentir la dépréciation de leur devise locale en puisant sur leurs réserves comme la Tunisie, la Russie et l’Egypte.
Cette 2ème stratégie peut être envisagée sur une courte durée lorsque les réserves de change ne sont pas très importantes. Elle permet de remédier à un déficit ponctuel de la balance des paiements, ou de stabiliser la monnaie le temps que le gouvernement mette en place les réformes structurelles améliorant la compétitivité de l’économie locale.
Lorsque ces réformes tardent à venir, le pays épuise ses réserves et n’a plus les moyens de soutenir sa monnaie, laquelle se déprécie très fortement rattrapant tout le retard qu’elle a pris pendant l’intervention de la banque centrale.
Le cas récent de l’Egypte s’est traduit par une chute de la livre égyptienne de plus de la moitié de sa valeur en 3 mois, fin 2016…