Le Chef du gouvernement ne peut avancer dans sa lutte contre la corruption sans prendre en considération trois pouvoirs qui orienteront son action.
Après l’interview donnée dimanche 4 juin 2017 à deux quotidiens tunisiens par le Chef du gouvernement, Youssef Chahed, trois membres du gouvernement, Hédi Majdoub, ministre de l’Intérieur, Iyed Dahmani, ministre auprès du Chef du gouvernement chargé des Relations avec l’ARP porte-parole du gouvernement, et Mabrouk Korchid, secrétaire d’Etat chargé des Domaines de l’Etat et des Affaires foncières, ont tenu, le 7 juin 2017, une conférence de presse pour signifier le réel engagement du pays dans la lutte contre la corruption.
Reste à savoir si Youssef Chahed est capable d’aller, comme il l’a déclaré, « jusqu’au bout ». Personne ne peut nier le courage politique du Chef du gouvernement qui a réussi à gagner l’adhésion des Tunisiens : après la manifestation de soutien du 26 mai 2017, on parle aujourd’hui d’une pétition ouverte à tous les Tunisiens.
Il est plus facile d’ouvrir la boîte de Pandore…
De ce point de vue, Youssef Chahed devra compter dans sa lutte avec trois pouvoirs qui ne manquent pas d’exercer des pressions sur son action et qui devront l’orienter dans un sens ou dans l’autre.
Le premier est celui de l’opinion publique qui, faut-il le rappeler, a trop souffert d’une corruption qui a impacté son quotidien et fait naître chez elle un sentiment d’injustice, voire un ressentiment.
Jusqu’où l’opinion publique acceptera-t-elle que le Chef du gouvernement aille, sachant qu’il est plus facile d’ouvrir la boîte de Pandore que de la refermer ?
Deuxième pouvoir : la société civile, notamment celle qui se montre toujours soucieuse du respect des lois. On en a eu un avant-goût avec la réaction de la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme (LTDH) qui a notamment condamné le 31 mai 2017, « la traduction de civils devant les tribunaux militaires, et la réactivation des articles de la loi 50 de l’année 1978, relative à l’état d’urgence ».
Inutile de préciser que ce pan de la société civile suivra de près l’évolution du dossier de la corruption et ne manquera pas d’attirer l’attention toutes les fois qu’il estimera que les libertés sont en danger.
Troisième et dernier pouvoir : les politiques. Certes, des pans entiers du paysage politique tunisien ont exprimé leur entière solidarité avec le Chef du gouvernement, mais que se passera-t-il quand certaines figures politiques seront directement touchées par cette croisade contre la corruption ?
Autre piste de réflexion intéressante que l’on peut emprunter à ce niveau de la réflexion : une lutte sans merci contre la corruption ne nécessitera-t-elle pas l’abandon de la loi sur la réconciliation économique et financière ?
A rappeler, à ce niveau, qu’une source digne de foi prétend que 9000 personnes dont 4000 fonctionnaires pourraient en bénéficier.
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