La soirée de demain 23 juillet 2017 au festival d’Ezzahra sera inédite au plein sens du terme. Et pour cause, des prisonniers incarcérés à la prison de Borj Erroumi vont animer la soirée en présentant un spectacle musical dans le cadre du festival.
À l’initiative du psychologue affecté à la prison et de certains cadres pénitentiaires et entraînés par l’artiste polyvalent tunisien Dhafer Ghrissa, un groupe de onze prisonniers s’est constitué en chorale, qui puise ses chansons dans le répertoire de la chanson « tarabiya » tunisienne et orientale, pour présenter un cocktail de chansons qui vont meubler la soirée au festival.
Ainsi, on aura droit à entendre ces prisonniers, condamnés tous à des périodes d’emprisonnement assez longues (cinq ans et plus), étaler leurs talents en chantant Saliha, Ali Riahi, Hédi Jouini, du Malouf tunisien, mais aussi Salah Abdelhay, Abdelwahab et Om Kalthoum. L’espace d’une petite heure qui aura certainement un impact important sur leurs vies.
Contacté par leconomistemaghrébin.com, Dhafer Ghrissa, qui a pris en charge le côté artistique du spectacle, nous a fait part de sa grande joie de voir ce rêve, le sien mais aussi celui des prisonniers, se concrétiser.
En dépit des difficultés, les initiateurs du spectacle ont tenu bon, défiant un certain conservatisme de la part de membres de l’appareil sécuritaire, qui n’ont pas apprécié le fait de voir des détenus quitter leurs cellules pour se donner en spectacle dans le cadre d’un festival. Finalement, ils sont revenus à de meilleurs sentiments et ont donné leur aval pour que le spectacle ait lieu.
M. Ghrissa, artiste et militant des droits de l’Homme œuvrant pour la section de Tunis de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), se voulant porte-parole des prisonniers artistes, nous a aussi fait part de la satisfaction de ces prisonniers de voir leur rêve se réaliser. » L’un d’eux, nous rapporte-t-il, m’a demandé de prier le chauffeur du bus qui va les conduire au spectacle de passer près de la côte, il a tant envie de voir la mer », dit-il. Un autre n’arrive plus depuis une semaine à dormir car « cela fait quatorze années qu’il n’a pas quitté sa cellule ».
Cependant, pour pouvoir assister au spectacle, il faut avoir une invitation, car le droit d’entrée, sécurité oblige, n’est pas payant et ouvert à tous les publics. Déjà, plusieurs activistes de la société civile et militants des droits de l’Homme craignent de ne pas pouvoir se procurer des invitations qui, aux dernières nouvelles, sont distribuées au compte-gouttes.