Le président du parti islamiste Ennahdha ne souhaite pas que le Chef du gouvernement, Youssef Chahed, se porte candidat aux élections présidentielles de 2019.
S’exprimant dans la soirée d’hier, mardi 1eraoût 2017, lors d’un entretien spécial sur la chaîne Nessma Tv, Ghannouchi a considéré que la mission de l’actuel Chef du gouvernement est de veiller au bon déroulement des prochaines élections municipales, prévues pour le 17 décembre 2017 et des élections régionales qui vont éventuellement suivre, outre le suivi de la gestion quotidienne des affaires du gouvernement, notamment le dossier économique et social.
Sur un ton qui ressemble à une recommandation plutôt qu’à une suggestion, Rached Ghannouchi semble chercher à couper l’herbe sous les pieds de Chahed qui n’a pourtant jamais, il faut le dire, laisser entendre avoir l’ambition de se porter candidat aux présidentielles de 2019. Cependant, la montée de sa cote de popularité ces derniers mois, dont attestent des sondages d’opinion effectués par plusieurs institutions de sondage, notamment suite à la croisade qu’il a lancée contre la corruption et les réseaux de contrebande qui ont gangrené l’économie nationale, mais également les positions souverainistes qu’il a prises sur le plan des relations extérieures de la Tunisie, vis-à-vis de l’Allemagne au mois de février dernier et des Etats-Unis d’Amérique lors de sa dernière visite effectuée le mois de juillet dernier, et qui n’ont pas manqué d’avoir des échos favorables dans l’opinion publique nationale.
Chahed est désormais placé en pole position pour une éventuelle course vers le Palais de Carthage. Cependant, cela semble compromettre les calculs de Rached Ghannouchi et de son parti. Chose qui pourrait donner une idée sur les intentions des islamistes pour ces prochaines élections. Car, si le parti Ennahdha a déclaré assez tôt en 2014 qu’il ne vise pas le Palais de Carthage, il commence pourtant à afficher cette ambition pour les élections de 2019.
Et indépendamment de la personne qui serait le candidat du parti islamiste pour ces élections, ce pourrait être Ghannouchi lui-même. Ce qui nous amène à en déduire que Youssef Chahed, comme potentiel concurrent à la présidence de la République, devient gênant pour le parti Ennahdha.
Cependant, ce que Ghannouchi semble oublier, c’est que l’Accord de Carthage, sur la base duquel Chahed a été promu Chef du gouvernement, ne stipule pas une telle exigence, et ce, contrairement à ce qui s’est passé en 2013 – 2014 avec l’ancien chef du gouvernement, Mehdi Jomaa.
A suivre Ghannouchi dans son raisonnement, un chef de gouvernement, quel qu’il soit, n’a pas le droit de postuler à la magistrature suprême de l’Etat, surtout s’il réussit la mission pour laquelle il a été désigné. Or le bon sens est supposé indiquer que c’est uniquement la réussite qui doit créer chez le responsable gouvernemental l’ambition d’aller de l’avant.
C’est pourquoi, la recommandation de Ghannouchi ne peut être comprise que dans la mesure où la réussite d’un chef de gouvernement devrait être sanctionnée afin de ne pas faire de l’ombre à des partis dont l’unique ambition est de se positionner éternellement dans la sphère du pouvoir, quitte à écarter, par tous les moyens, tout éventuel concurrent.
Ce qui est à craindre, c’est qu’à partir de ce moment, la seule obsession du parti Ennahdha, surtout dans le cas où Youssef Chahed ne donnerait pas une suite favorable au « conseil » de Ghannouchi, sera de tout faire pour que la crise actuelle en Tunisie s’amplifie, rien que pour le seul objectif de ternir son image. Et peu importe les conséquences néfastes pour le pays, pourvu que les obsessions politiques pour le pouvoir à tout prix des uns et des autres soient satisfaites.