Le mercredi 26 juillet 2017, le projet de loi sur la lutte contre les violences faites aux femmes a été voté à l’Assemblée. Environ une semaine plus tard, le mardi 1er août 2017, une loi similaire est votée en Jordanie avec, notamment, l’abolition de l’article 308 du Code pénal jordanien qui permettait aux auteurs de viol d’échapper à l’emprisonnement s’ils acceptent d’épouser leur victime.
Cette nouvelle loi tunisienne, dont les articles les plus commentés sont ceux portant sur les violences conjugales, le viol ou encore le consentement lors d’un acte sexuel, représente une réelle avancée pour la condition de la femme en Tunisie. Certaines mesures sont également prévues d’un point de vue économique avec, par exemple, l’article 18 sur les inégalités salariales. Mais où en est économiquement la femme tunisienne par rapport à la femme européenne, française ou encore marocaine ?
La situation actuelle
La France et l’Union européenne étant perçues comme faisant partie des pays les plus avancés en matière de droits de la femme et le Maroc ayant, tout comme la Tunisie, adopté une nouvelle Constitution s’engageant à combattre les inégalités entre hommes et femmes, prenons ces trois zones géographiques comme points de comparaison en utilisant trois indicateurs: l’écart salarial entre hommes et femmes, le taux de chômage des femmes par rapport à celui des hommes et la répartition de l’héritage.
L’écart salarial entre hommes et femmes est d’environ 23% en France et d’une moyenne de 16,4% dans l’Union européenne. Quant au Maroc, il est d’environ 17%. La femme tunisienne bénéficierait donc d’une meilleure équité salariale puisqu’à diplôme et à poste égaux, son salaire est d’environ 14,6% inférieur à celui d’un homme.
Concernant le taux de chômage, la femme tunisienne se porte cette fois-ci moins bien, avec un taux d’environ 22,2% contre 11,4% pour les hommes. Dans une meilleure position, nous retrouvons la femme marocaine, dont le taux de chômage est d’environ 14,7% contre 10,4% pour les hommes. Outre-mer, la femme française a un taux de chômage d’environ 9,8% contre 10,1% pour les hommes. A l’échelle de l’Union européenne, la femme affiche un taux de chômage moyen de 8,4% contre 8% pour les hommes. La Tunisie se retrouve ici en bas de la liste, avec un taux de chômage féminin élevé et un écart conséquent par rapport aux hommes.
La question de la répartition de la succession est plus rapide à aborder, étant donné que les lois tunisiennes et marocaines sont à peu près similaires : la femme hérite de la moitié des parts de l’homme. Par exemple, pour une famille comportant un fils et deux filles, le fils recevra 50% des biens du père défunt, alors que les deux filles recevront 25% chacune. De l’autre côté, les lois sur la succession dans l’Union européenne semblent également assez homogènes. Les enfants se partagent les biens, peu importe leur sexe.
Une avancée possible
Les articles contenus dans ce projet de loi visent à lutter contre les inégalités ainsi que les violences physiques, psychologiques ou encore économiques, dont la femme tunisienne peut être victime. Ils ont aussi pour but de combattre les discriminations auxquelles elle peut être sujette. Discriminations qui sont souvent vues comme le point de départ des disparités entre elle et son homologue masculin.
Si ce projet de loi réussit à faire reculer certaines de ces disparités, telles qu’un écart salarial déjà peu élevé par rapport à d’autres, et sur le long terme, à ancrer des pratiques égalitaires vis-à-vis des deux sexes, cela pourrait hisser une Tunisie, déjà vue comme chef de file des droits de la femme dans le monde arabe, parmi les pays les plus avancés dans le domaine.
Une telle avancée dépendra également de la capacité et de la volonté d’appliquer cette loi. N’oublions pas que ces textes viennent appuyer une Constitution tunisienne, dont l’article 46 dispose clairement que « l’Etat s’engage à protéger les droits acquis de la femme, les soutient et œuvre à les améliorer. L’Etat garantit l’égalité des chances entre la femme et l’homme pour assumer les différentes responsabilités et dans tous les domaines. L’Etat œuvre à réaliser la parité entre la femme et l’homme dans les Conseils élus. L’Etat prend les mesures nécessaires afin d’éradiquer la violence contre les femmes ».