Hichem Ajbouni, expert-comptable, membre fondateur du Courant démocratique (Attayar) présente sa vision du budget 2018 pour les lecteurs de leconomistemaghrebin.com
Pour Hichem Ajbouni, bien avant de parler du budget 2018 la situation actuelle nécessite l’adoption d’une loi de finances complémentaire pour 2017 vu que l’hypothèse de croissance de 2,5% pour 2017, selon toute vraisemblance, ne se réalisera pas. En effet, le premier trimestre 2017 a enregistré une croissance de 0,9% par rapport au dernier trimestre de l’année 2016 tout en précisant que les indices actuels montrent bel et bien que le taux escompté de 2,5% ne sera pas atteint vers la fin de l’année.
« Comment pourrait-il en être autrement, renchérit notre interlocuteur, alors que le gouvernement a augmenté la pression fiscale sur les produits, d’une part, et a imposé une contribution exceptionnelle sur les entreprises, d’autre part. Sans parler de l’exportation, supposée être un moteur de croissance, qui ne décolle pas ? ». D’où la nécéssité d’une LF complémentaire pour ajuster les équilibres macro-économiques des finances publiques.
Selon l’expert-comptable, il faut bien se rendre compte que la création de richesses, soit un taux de croissance élevé, demeure la priorité pour le budget 2018 et pour cela il est nécessaire d’avoir dès le départ une vision claire, « sauf que nous ne disposons pas de vision claire. Nous continuons à gérer au jour le jour les finances publiques, il suffit de suivre les déclarations du ministère des Finances par intérim pour s’en apercevoir ».
Il ajoute que les gouvernements successifs ont pris plus de 500 mesures fiscales depuis 2012 essayant de colmater les brèches dans le budget avec des mesures provisoires qui manquaient totalement de vision, « ce qui n’a fait que bloquer davantage l’investissement et augmenter l’évasion fiscale », regrette-il.
Quant à la réforme fiscale, Hichem Ajbouni considère qu’une réforme fiscale a déjà été mise en place depuis 2013 et qu’il s’agit de la mettre à jour dans le cadre de la continuité de l’Etat.
Concernant le déficit commercial, notre interlocuteur a considéré qu’il a atteint des records historiques : « Il faut limiter les importations arbitraires et superflues, et ce, par le biais de l’établissement d’une liste, la réduction du quota des importations », propose-t-il. Ainsi l’économie tunisienne ne crée plus de richesses et elle s’est transformée en une économie de rente et de franchise.
Sur un autre volet, il a indiqué qu’une politique ferme de lutte contre la corruption pourrait booster le taux de croissance de deux points. De même une politique de bonne gouvernance, soutient-il.
Pour le budget 2018, l’endettement sera inévitable, déclare Hichem Ajbouni. Cependant, il a recommandé une utilisation rationnelle de l’argent de la dette et a plaidé pour son orientation vers l’investissement : « Le crime qui a été commis contre la Tunisie depuis 2011 jusqu’à maintenant c’est celui de s’endetter non pas pour investir mais pour payer les salaires et consommer », a-t-il déploré.
Pour ce qui concerne la masse salariale en 2018, l’expert-comptable a proposé de la geler : « Afin de réduire la masse salariale, il faut augmenter le taux de croissance, pour le faire il faut inclure l’économie informelle dans l’économie formelle et à ce moment le PIB va augmenter et la masse salariale en pourcentage va baisser. En dehors de ce schéma, il est utopique de croire de pouvoir y remédier .»