Samedi 9 septembre 2017. Il est 9 heures 30. La Place Pasteur est quasiment déserte. Quelques voitures traversent la Place et quelques passants s’orientent vers une des portes du Belvédère toute proche.
Pour Mohamed, qui s’arrête un instant pour garer son taxi, il n’y a rien d’étonnant à ce calme matinal : «C’est bien le cas depuis que la « Troïka » a décidé, en 2012, de faire du samedi une journée chômée.»
«Certes, nous sommes à l’heure de la rentrée administrative et scolaire, mais il n’y a pas de mouvement; ça ne commence à bouger que vers 11 heures ou midi. C’est un second dimanche», sourit-il.
Plus bas, sur l’Avenue de la Liberté, un gérant de café, Issam, confirme la baisse d’activité du samedi: «Ce quartier est plein de bureaux. Or, avec le repos du samedi, on crève la fin», précise-t-il. «Maintenant, on ferme au plus tard à 11 heures-midi. Ce qui était loin le cas précédemment», ajoute-t-il.
«Le malheur des uns fait le bonheur des autres»
Dans une rue voisine de notre café, une gargote est fermée. «Elle n’ouvre plus le samedi», commente un gardien d’immeuble des environs. «Elle ouvrira sans doute avec le démarrage de l’année universitaire», explique-t-on, en pointant du doigt un établissement universitaire privé.
«Avec le chômage du samedi, cela me fait une journée en moins pour mon petit business», s’empresse-t-il d’indiquer, par ailleurs. Notre homme gagne un peu d’argent en aidant les automobilistes à se garer tout le long du trottoir.
Mais, il arrive que «le malheur des uns fasse le bonheur des autres». C’est du moins le constat fait par Messaoud, blouse grise et cigarette à la bouche, employé dans une quincaillerie du quartier Lafayette: «Le repos du samedi offre un peu plus de temps pour faire du bricolage ou s’occuper de son jardin.»
D’où, souligne-t-il, le fait qu’il y ait un peu plus de clients le samedi. «Et avec la cherté de la vie, beaucoup sont encouragés à faire presque tout par eux-mêmes.»
Attendant son bus pas bien loin du jardin du Passage, Imed, responsable des services communs, dans une entreprise du bâtiment, la quarantaine, pantacourt bleu et chemise à carreaux assortie, insiste pour dire que le repos du samedi est «incontestablement, un mauvais choix».
Une décision «populiste»
«Avant, affirme-t-il, je disposais d’un jour supplémentaire pour me rendre dans les administrations. Une longueur d’avance pour nos chantiers qui exigent beaucoup de déplacements et de la paperasse.»
Pour lui, non seulement les administrations ferment samedi, mais en plus de cela, vendredi à partir de midi, on ne trouve plus personne dans les administrations. Et lorsqu’on ajoute à cela, le laisser-aller et le farniente qui caractérisent le Tunisien, nous ne pouvons que crier: «Bonjour les dégâts!»
Pour ce maîtrisard en sciences économiques, la décision a été «populiste» et a été prise par des «dirigeants qui n’ont pas mesuré ses conséquences».