Décidée et exécutée sans cause annoncée, cette affaire qui a défrayé dernièrement la chronique pose de multiples questions demeurées sans réponse. Focus.
Quoi que l’on puisse dire ou faire de commentaire sur ce qui vient de se passer dernièrement à Tunis, cela demeurera incontestablement dans le souvenir de tous ceux qui suivent de près la chose publique – à part bien sûr celui ou ceux qui en sont à l’origine – comme étant un événement bien malheureux à tout point de vue.
L’expulsion, vendredi 8 septembre dernier du prince Hichem, cousin germain du Roi Mohammed VI, par les autorités tunisiennes est incontestablement de ceux-là, un véritable « cadeau » de la déconvenue et, disons-le, de l’égarement en matière diplomatique.
Les faits, tels que cités par les médias et l’intéressé lui-même, se suffisent à eux-mêmes pour souligner l’aspect incongru et manifestement inapproprié d’un pareil acte venant de ceux qui en sont les auteurs et les exécutants. Venu le jour même à Tunis pour animer un séminaire organisé par l’université de Stanford, dimanche 10 septembre, à Tunis, sur « la gouvernance et les défis sécuritaires dans 3 pays arabes: le Maroc, l’Egypte et le Yémen », il s’est vu, à peine installé dans un hôtel de Gammarth, invité à quitter les lieux sans préciser ni la raison, ni la destination.
Cinq policiers en costume – cravate ont approché le prince pour lui demander de les accompagner au commissariat pour une question de formalités. Ils l’ont accompagné dans sa chambre où il a fait, devant témoins, ses bagages. Escorté, il a fait le trajet jusqu’au commissariat pour s’entendre dire qu’il doit quitter le pays séance tenante.
Il a été, ensuite, accompagné jusqu’à l’aéroport où il a été mis dans un avion en partance pour la France. Entre-temps et durant toute l’opération, les questions insistantes du prince sont restées sans réponse. Il aurait même demandé que lui soit soumis l’ordre d’expulsion mais en vain. On s’est contenté de lui dire que rien ne lui était reproché, seulement qu’il devait quitter le territoire tunisien.
« J’ai été conduit à l’aéroport, où là j’ai exigé un document justifiant mon expulsion, alors que je n’ai commis aucune infraction…Les policiers étaient embarrassés, ils ont évoqué une décision de souveraineté et ont finalement annulé sur mon passeport le tampon d’entrée dans le pays« , a-t-il dit après son expulsion.
Aucune explication ni clarification de la part des autorités ne sont venues lever le voile sur cet incident. Un mutisme total.
La nature ayant horreur du vide, toutes sortes d’ hypothèses ont été échafaudées çà et là pour tenter de trouver un semblant d’explication aux multiples questions posées par cette affaire : des arguments du genre que l’expulsion a été faite « à la demande des autorités marocaines du fait du statut d’opposant du prince » ou, à l’extrême, qu’elle a été décidée « pour conjurer une menace d’atteinte à la personne du prince ».
Mais quelles que soient les raisons pouvant être invoquées pour décider que le prince est » persona non grata », ces procédés ne sont pas sans nous rappeler de malheureux précédents, toutes proportions gardées, comme l’affaire Mahmoudi Baghdedi, entre autres.
Aucun éclaircissement de la part d’aucune source autorisée n’est venu apporter un semblant d’explication à ce puzzle. Et ce n’est qu’aux premières heures de mardi dernier qu’une timide éclaircie est apparue dans le ciel de ce « mystère ». Dans un post publié sur son compte Facebook, Saida Garrach, porte-parole de la Présidence de la République, a commenté l’opération de cette expulsion en ces termes : « Ceux qui l’ont menée n’ont pas consulté des responsables ». Elle a ajouté que le Président de la République est « exaspéré » à cause de cela.
De même et lors d’une intervention télévisée, Mehdi Ben Gharbia, ministre chargé des Relations avec les Instances constitutionnelles, la Société civile et les Organisations des droits de l’Homme, a reconnu que bien que n’ayant pas d’informations précises concernant ce sujet, il estime que cette expulsion est « une faute ».
Des voix se sont élevées pour demander qu’une enquête soit instruite à cet effet. En attendant, l’ombre inélégante de ce déplorable incident demeure. Force est de dire que c’est un égarement de plus à mettre à l’actif des « jours sans » et des décisions mal inspirées.