Dans le secteur de l’artisanat ou celui de l’entrepreneuriat, les femmes sont de plus en plus nombreuses depuis les dix dernières années. Dans ce milieu, la profession se féminise de plus en plus. Cela dit, leur parcours n’a pas été de tout repos. Zoom sur leurs témoignages.
Chahida Whibi, originaire de Nabeul, est l’exemple même d’une vraie militante que la vie n’a pas épargnée. Elle a perdu tout ce qu’elle avait : ses deux enfants, un qui avait 6 ans et l’autre 10 ans dans l’incendie de sa maison. Elle nous raconte avec émotion : « J’ai tout perdu quand ma maison a pris feu, je n’ai eu aucune compensation de la part de l’Etat. J’ai dû me relever toute seule, avec un mari hospitalisé, alors que j’étais enceinte et le médecin à cette époque m’a prévenue que l’enfant serait handicapé. Je ne savais plus quoi faire quand par hasard, j’ai rencontré un représentant d’Enda avec qui j’ai commencé à travailler, en me spécialisant dans la fabrication artisanale des produits du terroir comme la Bssissa.« .
Cela fait plus de 16 ans qu’elle fait ce travail. Elle ajoute: « Maintenant, je suis mon propre chef entrepreneur, je ne suis plus dans l’informel, mais au contraire, je dispose d’une patente et j’emploie 8 salariées que je considère comme mes proches ».
Chahida est devenue en revanche une référence dans le domaine de l’épicerie fine. Aujourd’hui, elle expose aussi bien dans les foires nationales qu’internationales. A ce jour, elle a obtenu un total de quatorze prêts d’une valeur de 31.700 dinars.
Autre exemple de réussite: Wafa Makhlouf qui incarne la jeunesse dans le monde politique. Elle est députée indépendante et présidente du CJD international. Elle déclare: » Je suis le fruit du système tunisien qui a réussi qu’on le veuille ou non ». Mariée à l’âge de 19 ans, et maman à l’âge de 21 ans, elle souligne qu’elle a obtenu sa maîtrise en finances, après 8 ans « parce qu’être maman et poursuivre ses études en même temps ce n’est pas évident, » a-t-elle indiqué.
Selon elle, l’échec n’est pas une fatalité, il suffit de rebondir, peu importe l’âge qu’on a. Elle ajoute: « Plus on est déterminé, plus on va de l’avant. J’ai créé mon entreprise en 2003, j’ai travaillé sur le secteur de la collecte des déchets ménagers et le nettoyage des plages. Et le fait de faire partie de la société civile m’a permis d’intégrer le CJD et devenir la présidente du Conseil des jeunes dirigeants ( CJD) en 2011 ».
Evoquant les difficultés de survie des entreprises, elle a rappelé que le taux d’échec des entreprises s’élève à 95%, chiffre avancé par l’Agence de Promotion de l’Industrie et de l’Innovation. Selon elle, les clés de réussite d’une entreprise, à travers son expérience, est la diversification des produits et des clients.
Asma Ben Hamida, la « dame de fer », cofondatrice d’Enda, s’est construite une solide réputation au fil des années. Ce qui lui a valu le prix de la Femme d’influence de l’année 2016 pour son action pionnière dans la micro-finance en Tunisie.
Elle nous déclare : « 60% de nos affiliés sont des femmes. En 22 ans d’activité, nous avons vu défiler chez nous plus de 185.000 Tunisiens ». Sa vision de l’entrepreneuriat féminin : « il faut commencer petit ».
Et de continuer: « Tout le monde ne peut pas commencer comme Bill Gates. Aujourd’hui, des milliers de nos clientes sont devenues des jeunes entrepreneures ».
Sa botte secrète consiste à encourager tout esprit entrepreneurial. Elle précise également: « Nous avons tous été éduqués, malheureusement, pour devenir des salariés. Or il va falloir éradiquer cette mentalité et donner le goût de l’entrepreneuriat aux jeunes et aux femmes, même si cela n’a jamais été facile. Cela dit, il y a un début à tout. D’ailleurs, les Tunisiennes sont par nature des entrepreneures, il suffit de les accompagner au départ ».
« Quand on veut, on peut », dit l’adage. Ces dames, de vraies modèles à suivre, le prouvent.