Dans leurs déclarations accordées à leconomistemaghrebin.com, Noureddine Hajji, expert-comptable – Partner de EY Tunisie, Chokri Mamoghli, Universitaire – économiste, et Abderrazek Zouari, Universitaire – économiste, sont revenus sur le PLF 2018 et les solutions pour la relance économique, et ce, en marge de la conférence organisée, ce matin, par la Conect.
A cet égard, M. Hajji a affirmé que le projet de loi de Finances 2018 (PLF) a été élaboré, comme l’année précédente, dans un contexte extrêmement compliqué pour les pouvoirs publics. Un contexte marqué par un gap énorme au niveau du budget de l’Etat. On a d’un côté les dépenses qui sont élevées avec de l’autre, un manque terrible de ressources pour pouvoir combler ce gap qui est aujourd’hui estimé à environ 13 milliards de dinars.
Et à travers les prémices de ce PLF, il a souligné qu’on continue à être dans la même logique, ce qui est très dommageable. Une logique qui consiste à dire du moment qu’il y a un manque de ressources, nous allons donc augmenter les impôts et en inventer d’autres qui s’appliqueront à ceux qui ont l’habitude de payer, pour pouvoir combler ce gap-là.
Cette logique demeure, selon ses propos, complètement contre-productive et est un coup de massue pour le moral des chefs d’entreprise tunisiens et étrangers. Il faut reconnaître également les difficultés dans lesquelles le gouvernement se trouve pour élaborer cette loi de finances.
Face à cette situation, Noureddine Hajji a précisé qu’il faut oser changer complètement de logique et de paradigme pour approcher les choses d’une façon complètement différente. Ceci demande beaucoup de courage politique et puis une transformation au niveau de l’appareil de l’Etat pour qu’il puisse appliquer et implémenter ce qui existe déjà au niveau des différentes lois de finances antérieures.
Aller vers d’autres voies
Pour sa part, Chokri Mamoghli, a indiqué que selon ce PLF, le taux de pression fiscale va énormément augmenter aux dépens des ménages et consommateurs. En outre, on a essayé de privilégier les entreprises et leur laisser des marges de manœuvre afin qu’elles investissent. Cela paraît très difficile à mettre en œuvre parce que les ménages ont été sous pression depuis un certain nombre d’années et on continue à aller dans cette direction, alors qu’il y a des possibilités d’aller vers d’autres voies, notamment vers celle des forfaitaires.
Dans ce sens, il a affirmé que tout indique qu’il faille aller vers les forfaitaires et que cela n’a jamais été fait. Sachant qu’en Tunisie il y a 400 mille forfaitaires, dont les revenus procurés sont de l’ordre de 28 millions de dinars. Des revenus qui sont très faibles du moment qu’il y a beaucoup de marge de manœuvre à ce niveau là.
Il y a, également, la possibilité de récupérer des créances fiscales. L’Etat a sur un certains nombre d’entreprises des créances fiscales de l’ordre de 2400 millions de dinars. Il est possible de faire des efforts à ce niveau là, afin de récupérer davantage de créances. Dans le PLF 2018, l’Etat se propose de récupérer seulement 400 millions de dinars alors qu’on propose d’aller au-delà pour récupérer 600 millions de dinars.
Il faut, ainsi, raisonner en termes de dépenses. Ces dernières années, on ne fait qu’augmenter les recettes afin de compenser les dépenses. Ces dernières doivent être comprimées, notamment les dépenses des salaires de la fonction publique.
Pour ce faire, il faut, selon M. Mamoghli, arrêter significativement les recrutements; ce qui va maintenir dans un certain degré de stabilité la masse salariale. Il a recommandé, de même, de céder les participations minoritaires de l’Etat dans un certain nombre de banques et privatiser rapidement certaines entreprises publiques qui ne sont pas stratégiques, notamment celles qui appartiennent aux secteurs concurrentiels.
Il faut, dans le même ordre d’idée, revoir le système de compensation, notamment des produits de base, du transport et des hydrocarbures. Chokri Mamoghli a préconisé, à ce niveau là, de projeter des augmentations régulières et raisonnables, les accompagner par des augmentations de salaires pour les tranches des revenus les plus faibles, une légère augmentation du SMIG et du SMAG et des pensions servies aux familles nécessiteuses, afin qu’il y ait une amélioration des finances de l’Etat et une préservation de la situation financière des plus fragile d’entre nous.
Quant à Abderrazek Zouari, il estime que la solution aux problèmes de l’économie tunisienne passe par l’adoption d’une politique de relance par l’offre. Il faut donc améliorer la productivité qui permet une relance, sans pour autant dégrader la situation financière. Sachant que la productivité est aujourd’hui à 0 point de croissance alors qu’elle était, dans l’ancien régime, responsable de 2 points de croissance sur un total de 5 points.
Il faut aussi réformer le système fiscal. Jusqu’à maintenant, on n’essaie pas de contenir les dépenses et on cherche à collecter les recettes en augmentant les impôts. Or le système fiscal doit répondre à trois conditions. Il s’agit, selon M. Zouari, de la stabilité, l’équité et le rendement. Ces conditions n’apparaissent pas dans les nouvelles mesures fiscales.
Réformer les institutions
En outre, Abderrazek Zouari a recommandé la mise en place d’une politique industrielle adéquate parce qu’on n’a pas aujourd’hui une réelle vision industrielle. On parle depuis 20 ans de la montée en gamme de l’industrie tunisienne or cette industrie n’a pas montré sa montée en gamme. Ce qui fait que nous avons des industries traditionnelles qui ne peuvent plus être compétitives.
Il faut, de même, réformer les institutions parce qu’elles constituent des goulots d’étranglement. Aujourd’hui, nous avons reproduit à l’identique les institutions que l’on avait dans l’ancien régime, or ces institutions là sont épuisées et ne sont plus du tout productives, notamment le système éducatif, le système de retraite, de la santé, du transport…
M. Zouari a estimé qu’il est temps de se pencher sur les facteurs d’offre de la relance économique et non pas sur les facteurs de la demande. «Il est vrai que les facteurs de la demande peuvent améliorer le taux de croissance, mais ils provoquent des déséquilibres financiers; alors que les facteurs de l’offre améliorent la croissance, sans dégrader la situation financière», conclut-il.
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Bonjour, C’est bizarre que ces experts ne parlent pas ou peu du seul domaine fonctionnel en Tunisie : la corruption. Ils veulent appliquer les recettes du style : relance par l’offre, une politique industrielle, une ….. Je ne vous accable pas car vous êtes des produits du système tunisien. Si vous jetez un regard depuis l’extérieur vous allez comprendre les dégâts et vous allez comprendre qu’aucune solution n’est viable en Tunisie d’aujourd’hui sans une réelle prise de conscience du phénomène de la corruption. Détachez-vous du système. Bien à vous. M. Ouni