Triste sort que celui de nombreuses familles acculées à calculer à perte le temps qui passe, celui de leurs enfants qui ont choisi de noyer leur désespoir dans la Méditerranée poursuivant le mirage d’une vie meilleure…
Triste sort d’une grande majorité de cette jeunesse en quête d’affirmation de soi. A défaut d’un projet dans cette Tunisie post- révolution, ils ont opté pour la roulette russe exposant leur vie à une mort certaine.
Des motifs pour expliquer ce geste désespéré, il y en a plein : en tête, l’échec politique, la dérive de l’économie et surtout l’absence de projets de société. Le crépuscule des références en quelques sortes. La jeunesse se trouve dos au mur. Ils préfèrent mettre en danger leur vie, plutôt que de continuer à vivre dans la précarité.
Tous les jours les radeaux de la mort embarquent des dizaines de damnés de la terre pour les jeter en pâture à la mer. Peu d’entre eux arrivent à destination. Leurs familles mettront longtemps à connaître leur sort.
« El Harga », mot terrible. Appellation tragique et signification funeste. Jamais signifiant et signifié ne se sont autant accordés pour faire miroiter l’inéluctable, l’irréversible. Le mot en arabe porte en lui toute la démesure de la déperdition fatale.
« El harga », le verbe « hrag » renvoie à une sorte d’autodafé et d’une immolation par le feu. La référence tombe tel un couperet dans cette réalité d’aventure en mer. Des jeunes et des moins jeunes, tous âges et sexe confondus, acceptent n’importe quoi ayant en tête l’eldorado imaginaire, l’île de Lampedusa ! Malgré tous les dangers et la mort certaine, nombreux sont tous les jours que Dieu fait les candidats de ce voyage sans retour, prêts à braver tous les risques… prêts à mourir plutôt que de vivre ce qu’ils vivent au quotidien chez eux.
Rien ne pourra arrêter ce flux ininterrompu vers la mort, tel un suicide collectif, tant qu’on n’aura pas réussi à donner à ces jeunes désespérés un sens à leur vie. A bon entendeur…
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