Les Archives nationales de Tunisie (ANT), la Bibliothèque Nationale de Tunisie (BNT), le Croissant Rouge Tunisien (CRT), la Société Henry Dunant (SHD) et l’Association « Histoire et réconciliation » ont organisé le 11 octobre au siège des Archives nationales une rencontre intitulée : « Sur les traces d’Henry Dunant en Tunisie en 1856-1857 ».
Qui est Henry Dunant ? C’est un riche homme d’affaires genevois qui voulait se lancer dans l’agriculture en Algérie, colonisée alors depuis trente ans par la France. Pour cela, il lui fallait l’autorisation des autorités coloniales françaises. Or Napoléon III était alors au nord de l’Italie pour aider les Piémontais italiens à expulser les occupants autrichiens.
Henry Dunant fit le voyage en Italie où il devait rencontrer Napoléon III pour lui demander l’autorisation d’investir dans l’agriculture en Algérie. Au lieu d’une rencontre avec l’empereur français, Henry Dunant se trouva sur un champ de bataille, deux jours après le terrible affrontement de Solferino qui, en une seule journée, le 24 juin 1959, avait fait 40.000 victimes. Il découvre des milliers de blessés mourants sur le champ de bataille. Il mobilise la population locale, organise les premiers secours, oublie ses projets en Algérie, et revient à Genève décidé à tout mettre en œuvre pour créée une structure qui prendrait en charge « les soins aux militaires blessés ».
En 1862, Henry Dunant publie à ses frais ‘’Un souvenir de Solferino’’ et fait une proposition aux Etats, les invitant à formuler « quelque principe international, conventionnel et sacré lequel, une fois agréé, servirait de base à des sociétés de secours pour les blessés ».
En 1863, un « Comité des cinq » est créé. Il devient plus tard le Comité International de la Croix-Rouge (CICR). En 1864 est signée la « Convention pour l’amélioration du sort des militaires blessés dans les armées en campagne ».
Depuis, la voie ouverte par Henry Dunant n’a cessé de s’élargir jusqu’au 12 août 1949, jour où furent adoptées les fameuses conventions de Genève : la première « pour l’amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces armées en campagne », la deuxième « pour l’amélioration du sort des blessés, des malades et des naufragés des forces armées sur mer », la troisième est relative au traitement des prisonniers de guerre » et la quatrième « est relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre ».
Henry Dunant avait ouvert la voie à l’action humanitaire dans le monde. Le premier prix Nobel de la Paix, qu’il avait partagé avec l’humaniste français Gustave Passy, était amplement mérité.
C’est donc autour de cet homme exceptionnel qu’a eu lieu la rencontre du 11 octobre qui a réuni M. Hedi Jallab, directeur général des Archives nationales, Mme Raja Ben Slama, directrice de la Bibliothèque nationale, Dr Abdellatif Chabbou, Secrétaire général du Croissant-Rouge tunisien, M. Roger Durand, président de la Société Henri Dunant, M. Habib Kazdaghli, doyen de la Faculté des lettres de La Manouba, M. Khalifa Chater, historien, Mme Leila Blili, historienne, M. Hatem Bourial, journaliste et M.Mohammed Ben Ahmed, correspondant à Tunis de la Société Henry Dunant.
En ce milieu du XIXe siècle, la Régence de Tunis vivait alors à l’ère des réformes. Des réformes exceptionnelles très en avance et très hardies pour l’époque : l’esclavage est aboli en 1846 et une Constitution est adoptée en 1861.
C’est dans ce contexte d’une Tunisie en pleine frénésie réformatrice que les participants à la rencontre ont tenté de déceler les traces du passage à Tunis de l’humaniste suisse. Tous attendaient avec impatience l’intervention de M. Hedi Jallab qui promettait des scoops sur ce passage. Et de fait, le directeur des Archives a présenté à l’assistance trois preuves écrites du passage d’Henry Dunant à Tunis : la décoration, « Nichan al Iftikhar », accordée par Sadok Bey à Henry Dunant en 1860 (exposée au Musée international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge) ; une lettre d’Henri Dunant au Bey ; un commentaire du Bey au livre que lui avait offert Henry Dunant : « Notice sur la Régence de Tunis ».
C’est lors d’un séjour de six mois à Tunis (hiver-printemps 1856-1857) qu’Henry Dunant rédigea un carnet de voyage qu’il publia en 1857 sous le titre « Notice sur la Régence de Tunis ». Dans son livre, Dunant ne cachait pas son admiration pour le Bey abolitionniste : « Honneur donc à la mémoire d’Ahmed Bey et honte aux peuples qui conservent encore au milieu du XIXe siècle et au milieu de la civilisation et du christianisme, l’abominable institution de l’esclavage ! », s’exclamait le fondateur du CICR.
Les recherches se poursuivent pour trouver, dans les centaines de milliers de pages d’archives, d’autres traces écrites du passage d’Henry Dunant à Tunis.