La publication récente du 15 ème rapport de Doing Business et d’un rapport de la Carnegie Endowment for International Peace accréditent la thèse d’une révolution trahie!
Il serait, sans doute, très utile de s’attarder encore aujourd’hui sur deux récents événements qui en disent long sur l’évolution de l’économie tunisienne. Dans la mesure où ils envoient des messages bien négatifs à tous ceux auxquels on souhaite qu’ils viennent au secours d’un pays qui a accédé à la démocratie en 2011.
Le premier est le classement de la Tunisie dans le rapport 2018 de Doing Business, qui mesure, comme tout le monde sait, «la réglementation des affaires et son application effective dans 190 pays du monde».
Réalisé par le Groupe de la Banque Mondiale depuis 2003, l’Indice de la facilité des affaires de Doing Business est souvent déterminant pour quiconque souhaite investir dans un pays. Il étudie une dizaine de domaines qui ne peuvent qu’intéresser ces derniers : la création d’entreprises, l’obtention d’un permis de construire, le raccordement à l’électricité, le transfert de propriété, etc.
Entre les « ponts », le « vendredis quasiment chômés », les retards, les pause-cafés, …
En somme des indicateurs quasiment terre à terre qui nous indiquent un vécu de ce qu’on appelle ici et là le climat des affaires.
Or, le résultat de ce dernier rapport, publié le 31 octobre 2017, nous apprend que la Tunisie est classée 88ème. Mais aussi et surtout qu’elle a reculé de 11 places par rapport à 2016 où elle occupait le 77éme rang. Notre pays était au 74ème rang mondial en 2015.
Outre le carcan juridique qui fait que ce qui peut être entrepris en un jour sous d’autres cieux nécessite une semaine voire bien plus sous le soleil tunisien, il faut revenir à la même occasion sur l’implication du Tunisien dans son travail.
Entre les «ponts», les «vendredis quasiment chômés», les retards, les pause-cafés, les grèves et autres sit-ins… que de temps perdu dans nos administrations.
Une corruption devenue «endémique»
Le second événement, qui ne peut que s’inscrire dans le même cadre, est le rapport réalisé par le Carnegie Endowment for International Peace (un think-tank américain) et intitulé «Propagation de la corruption en Tunisie : une transition à risque». Et qui nous dit que la corruption a atteint dans notre pays un niveau alarmant.
Le rapport, révélé également le 31 octobre 2017, par l’une de ces ONG dont les opposants au régime de Zine El Abidine Ben Ali ressortaient chaque fois qu’il fallait montrer l’échec de la politique menée au cours de son long règne (1987-2011), indiquait que la corruption était devenue après la révolution une «force déstabilisatrice qui infecte l’économie, la politique mais aussi la sécurité du pays dans tous ses aspects» (sic).
Ajoutant que «la corruption était bien présente pendant l’ère Ben Ali, mais était assez bien contrôlée, contrairement aux dernières années, où elle est devenue « endémique », impliquant toutes les franges de la société tunisienne».
Peu de chose par rapport à ce qui se passe depuis un peu plus de six ans
Permettez, à ce propos, à un citoyen lambda de saisir toute la portée de cette dernière phrase. Cela veut dire que toutes les révélations faites depuis la révolution du 14 janvier 2011 ne seraient que peu de chose par rapport à ce qui se passe depuis un peu plus de six ans.
Et les images ne peuvent, à ce niveau, qu’inonder nos mémoires : la caverne d’Ali Baba d’un Ben Ali qui a entreposé des milliards- mal acquis- dans des placards soigneusement cachés, les trésors des Ben Ali-Trabelsi que l’on a exhibés dans une exposition censée nous montrer l’invraisemblable, les voitures de luxe acquises à coups de millions de dinars, les terrains et autres hôtels et champs dérobés à l’Etat ou à d’humbles citoyens, les villas contenant des œuvres d’art et des mosaïques romaines dérobées dans les sites archéologiques, etc.
Il y a vraiment de quoi s’interroger sur le rendu d’une révolution trahie!