Jamais un projet de loi n’a autant suscité de réactions et de critiques. Alors que de nombreuses franges de la société civile le refusent en bloc, les syndicats de police y tiennent « corps et âme », menaçant même de lever unilatéralement la protection des députés et des blocs parlementaires si la loi relative à la répression des atteintes contre les forces armées n’est pas votée. Une manifestation de protestation contre ce projet de loi est prévue dans quelques jours, précisément le 21 du mois courant.
Le projet de loi relatif à la répression des atteintes contre les forces armées ne date pas d’aujourd’hui. Il a été déposé par le ministère de l’Intérieur depuis le mois d’avril 2015. Le gouvernement avait en ce temps-là approuvé la proposition dudit projet et l’avait soumis à l’Assemblée des Représentants du Peuple.
Depuis, le sujet a été au centre d’une polémique de surcroît exacerbée par les faits divers de l’actualité impliquant des agents des forces de l’ordre.
D’emblée, le projet a fait l’objet d’un refus net et sans appel de la part de nombreux représentants de la société civile. Placée dans le cadre de la dualité « liberté et sécurité », cette polémique est revenue grandement à la charge à l’occasion de la tragédie du Bardo qui a coûté la vie au commandant Riadh Barrouta, poignardé vilement à mort par un terroriste.
Selon ses détracteurs, ce projet n’est nullement recevable du fait que nombre de ses dispositions sont jugées anticonstitutionnelles car restreignant le champ des libertés tant générales que personnelles.
En effet, de nombreuses peines d’emprisonnement y sont prévues pour quiconque se rendrait coupable d’agression verbale ou physique à l’encontre des forces armées. Que ce genre d’agression soit réprimé, cela tombe sous le sens et ne devrait pas soulever de réserves. Par contre, certaines dispositions contenues dans ce projet de loi font l’objet d’une contestation grandissante, voire de refus catégorique. Ainis l’article 12, à titre d’exemple, dispose que toute personne qui, sciemment, dénigre ou dévalorise les forces de sécurité est passible d’une peine d’emprisonnement de deux ans en plus d’une amende.
Il est clair que la mise en application de ce texte pourrait amener à des excès et donc à une forme de violation de la Constitution. Idem pour l’article 18.
En outre, ce texte met à l’abri les forces armées d’éventuelles poursuites judiciaires au cas où leurs interventions viendraient à entraîner soit des blessures ou le décès de tout individu en situation d’agresseur par rapport à eux.
De plus, pareilles dispositions sont jugées « redondantes » puisque le Code pénal contient des dispositions appropriées et pouvant suffire à réprimer toutes les formes d’agressions. Sans parler de la loi antiterroriste de 2015 qui protège à elle seule toute atteinte contre les forces armées.
Balayant d’un revers de la main toutes ces critiques, les syndicats de police ont appelé à se dresser contre toute tentative d’entrave à la promulgation de cette loi. Ils ont menacé d’organiser, le 21 novembre 2017, une manifestation nationale et même de lever le cas échéant la protection des députés et des présidents des blocs parlementaires, à partir du 25 novembre si le projet de loi sur la répression des atteintes contre les forces armées n’était pas examiné et voté dans un délai maximal de 15 jours.