La Chambre tuniso-française de Commerce et d’Industrie (CTFCI) et la Banque Centrale de Tunisie (BCT) ont organisé, ce matin à Tunis, un workshop sur les problématiques du transfert, et ce, en présence de Foued Lakhoua, président de la CTFCI, Chedly Ayari, Gouverneur de la BCT, Faïza Fekih, Directeur général des Opérations de change à la BCT, ainsi que des représentants de la BCT, des opérateurs économiques et des représentants de médias.
Dans ce cadre, M. Lakhoua a affirmé que l’accent sera mis sur 8 interrogations, qui ont posé problème auprès des investisseurs, à savoir le transfert des bénéfices et des dividendes, le transfert des frais d’assistance technique, les fiches d’investissement et les transactions boursières, le fonctionnement et le financement des sociétés non-résidentes, les investissements des entreprises tunisiennes à l’étranger, l’export des services d’entreprises tunisiennes, le commerce électronique, ainsi que le risque de change.
En réaction, M. Ayari a précisé que depuis 1993, date d’adoption de la convertibilité courante du dinar en application de l’article VIII des statuts du FMI, plusieurs assouplissements touchant les opérations commerciales, les transferts courants et les opérations financières et en capital avec l’étranger ont été introduits.
En fait, toutes les opérations courantes sur biens et services liées à la production (importations, exportations, transport, assistance technique, réparations d’équipement…) ainsi que les transferts à titre de revenus de facteurs de production (revenus du travail des étrangers travaillant en Tunisie, intérêts sur emprunts extérieurs, bénéfices et dividendes revenant aux non-résidents) sont pratiquement libres et ne nécessitent aucune autorisation de la part de la BCT.
Quant aux transactions relatives au compte capital, le gouverneur a indiqué que le degré de libéralisation est différent selon qu’il s’agit d’investisseurs non-résidents ou résidents.
Dans le même sillage, Mme Fekih a affirmé que la BCT est concernée par les opérations étrangères d’investissement. Certains avantages ont été accordés à ce titre. Elle a cité, par exemple, que tous les transferts liés à l’investissement étranger sur le marché primaire sont libres en vertu de l’article premier du Code des changes, à condition que l’investissement soit réalisé dans des secteurs régis par un code et ouverts aux étrangers tels que l’industrie, les services, l’énergie, l’agriculture, le tourisme…et que le financement de l’investissement ait lieu par importation de devises en numéraire justifiée par une fiche d’investissement.
Sur le marché secondaire (Bourse ou achat de titres de propriété sur le marché de gré à gré), la responsable a fait savoir que l’investissement est libre à condition que la part des étrangers dans le capital reste inférieure à 50% et que le secteur soit régi par un code.
Ainsi, Faïza Fekih a précisé que l’investissement étranger n’est limité que dans certaines activités de services non destinées totalement à l’export telles la promotion immobilière, les agences de voyages et la consignation de navires (dans la limite de 50%).
Elle n’a pas manqué de rappeler qu’un régime dérogatoire a été réservé aux entreprises dont la production est destinée totalement à l’exportation et dont le capital est détenu à hauteur d’au moins 66% par des non-résidents et financé en devises. Ces entreprises dites non-résidentes peuvent, selon ses dires, être implantées sur tout le territoire tunisien contrairement à ce qui est prévu dans d’autres pays où le rapatriement est une obligation qui incombe à toutes les sociétés installées sur le sol du pays, avec instauration de « zones franches », géographiquement limitées et n’ayant aucune interférence avec l’activité locale.
Pour le cas de la Tunisie, ces sociétés jouissent d’une liberté totale sur le plan du change et ne sont pas soumises au rapatriement de leurs produits d’exportation.
D’autre part, Mme Fekih a souligné que dans l’optique des flux financiers, l’excédent induit par les opérations commerciales des sociétés non-résidentes n’est pas compté dans les réserves en devises du pays.
BCT : mesures adoptées en faveur des non-résidents
Consciente de la perception que peuvent véhiculer les difficultés rencontrées par certains investisseurs étrangers pour réaliser des transferts en principe libres, et ce, en l’absence de justificatifs exigés, la BCT a, selon le Gouverneur, entrepris une action de revue de la réglementation de change en vue d’assouplir certaines procédures et apaiser la contrainte de change sur les opérateurs économiques aussi bien résidents que non-résidents et témoigner aux différents intervenants l’engagement ferme et irréversible des autorités tunisiennes à l’instauration d’un cadre privilégiant la libre mobilité du capital.
Dans ce sens, M. Ayari a estimé qu’une série de mesures vient d’être adoptées en faveur des non-résidents. Il s’agit de la digitalisation de la fiche d’investissement permettant à un investisseur non-résident de s’auto-déclarer et d’établir lui-même sa fiche d’investissement qui sera validée par l’intermédiaire agréé domiciliataire de son dossier d’investissement.
Il s’agit, également, de la reconversion des avances en comptes courants accordées par des non-résidents en devises en augmentation du capital, et du règlement à l’étranger du prix de cession de parts ou d’actions entre étrangers non-résidents, ainsi que l’accès des sociétés non-résidentes aux financements leasing pour l’acquisition d’équipements nécessaires à la production et des matériels roulants utilitaires.
Au final, le Gouverneur a estimé que la Tunisie vaut la peine d’être jouée comme risque. Il s’est adressé aux investisseurs étrangers: « On ne vous demande pas d’assumer le risque sécuritaire qui reste de notre responsabilité, mais il faut que vous assumiez le risque commercial et économique. Si vous n’êtes pas en mesure de le faire, c’est que vous n’êtes pas des investisseurs mais des placeurs d’argent ».
Et d’ajouter: « Vous devez repenser vos modèles d’investissement afin de privilégier les investissements à haut contenu technologique et à haute valeur ajoutée et sortir du modèle de la sous-traitance et des investissements à bas coûts qui ont d’ores et déjà fait leur temps ».