Dans de nombreux domaines, on parle de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption (INLUCC), où certains secteurs peuvent mieux faire que d’autres. Comment appréhender les normes et les dispositions légales, nationales et internationales en matière de prévention contre la corruption dans le secteur de la santé?
Tel est le thème d’un colloque international organisé les 28 et 29 novembre par l’Instance nationale de lutte contre la corruption, en collaboration avec la Faculté des Sciences Politiques, Juridiques et Sociales de Tunis, les Facultés de Médecine et de Pharmacie, le Conseil National de l’Ordre des Médecins et le Conseil National de l’Ordre des Pharmaciens, avec l’ appui de la GIZ, de l’Ambassade du Canada, ainsi que de toutes les parties prenantes opérant dans le secteur de la santé.
Objectif: une meilleure gouvernance dans le secteur de la santé. Neila Chaâbane, doyenne de la Faculté des Sciences Juridiques, Politiques et Sociales de Tunis a souligné que les regards sont aujourd’hui tournés vers le secteur de la santé, pas seulement en Tunisie, mais partout dans le monde. Selon elle, il faut qu’il y ait une formation spécialisée pour les magistrats et les avocats. « Nous comptons créer un master en droit de la santé qui sera ouvert aux juristes et non juristes », a-t-elle annoncé.
Marc-André Gagnon, Economiste, Professeur en politiques publiques au Carleton University, Canada, a mis l’accent sur l’absence d’une définition universelle de la corruption. Il souligne: « Quand on évoque la corruption, on ne sait pas de quoi on parle! Ma définition à moi, c’est lorsque les institutions publiques ne servent plus le rôle social pour lesquelles elles ont été mises en place, mais qu’elles servent davantage des intérêts privés ». Et de poursuivre: « Il y a les mêmes problèmes qui reviennent, mais le degré de gravité varie d’un pays à un autre ».
Pour Sonia Ben Cheikh, secrétaire d’Etat à la Santé, la situation n’est pas aussi catastrophique qu’on le présente. Elle précise: « Depuis qu’on est à la tête du ministère avec feu Slim Chaker, puis Mohamed Trabelsi par intérim, et avec Imed Hammami, on a mis le dossier de la lutte contre la corruption comme l’une de priorités majeures. D’ailleurs, nous avons mis à jour la contrebande qui existe dans certains hôpitaux en matière de médicaments et transféré une dizaine de dossiers à la justice ».
Par ailleurs, Chawki Tabib, président de l’Instance nationale de lutte contre la corruption, a pointé l’absence de volonté de certains ministères de combattre sérieusement la corruption. Il déclare dans ce sens : « En 2016, le ministère de la Santé n’a transmis à la justice que trois dossiers de corruption! Certains ministères n’ont pas collaboré avec l’instance », s’insurge-t-il.
De son côté, Habiba Mizouni, secrétaire générale du Syndicat des Médecins, Médecins Dentistes et Pharmaciens Hospitalo-Universitaires, a soulevé l’importance de la numérisation, un outil efficace pour instaurer la bonne gouvernance dans le secteur de la santé. Elle précise à cet effet: « Il faut qu’il y ait de la transparence budgétaire avec des données fiables et chiffrées. Nous devons à tout prix faciliter l’accès aux soins ».
Sommes-nous prêts à relever le défi de la numérisation? La réponse revient aux administrations publiques de s’adapter à ce développement incontournable.