La tendance mondiale est irréversible en matière de transition énergétique. La Tunisie ne semble pas encore prête.
« Il est important de démontrer que cette transition constitue une opportunité pour l’économie nationale et non pas une contrainte en termes de croissance économique », déclare Boutheina Ben Yaghlane, Directrice générale de la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), lors du débat ayant pour thème « Transition énergétique en Tunisie, défis et opportunités pour l’Europe et la Méditerranée », organisé par le think-tank Solidar.
Elle déclare: « La Tunisie a adopté une politique volontariste de lutte contre les changements climatiques. D’ailleurs, dans son NDC, la Tunisie s’est engagée sur une réduction de 41% de son intensité carbone en 2030 par rapport à 2010. Concrètement, ceci ne peut être atteint qu’à travers des projets d’atténuation et d’adaptation. A la CDC, nous estimons que nous sommes concernés par cet engagement ».
Il est clair que l’avenir de la croissance dans le monde dépendra du développement durable et de l’économie qui seront les leviers futurs de la création de la richesse et de l’emploi. Qu’en est-il pour le cas de la Tunisie?
« L’économie verte recèle un potentiel de croissance durable et de création d’emplois important », affirme Mme. Ben Yaghlane. L’intervention de la CDC dans le domaine des énergies renouvelables se manifeste à travers des investissements directs dans des grands projets ainsi que des projets d’infrastructure.
Partant du constat que le développement des énergies renouvelables devient aujourd’hui une nécessité pour le pays, et ce, en raison du déficit croissant de la balance énergétique qui a été multiplié par 7 entre 2010 et 2016, représentant désormais 45% de la demande énergétique, Mme. Ben Yaghlane déclare que les projets d’énergies renouvelables se prêtent bien à des montages en Partenariat Public Privé (PPP), où il est question, en amont, de la recherche du financement pour construire l’infrastructure en assumant les risques et en allégeant le fardeau sur les finances publiques.
Elle précise à cet effet: « En aval, la partie privée s’occupera de l’exploitation de l’infrastructure. Ainsi, le partenaire public garantit à l’opérateur la possibilité de vendre des kilowatt-heure d’électricité (ou des mètres cubes d’eau) produits ou distribués. Ici la CDC peut jouer le rôle d’un tiers de confiance rapprochant les deux parties ». De ce fait, les projets d’énergies renouvelables peuvent avoir un impact régional étant donné la diversité des caractéristiques régionales : éolien dans le nord, PV dans le sud par exemple.
Rappelons qu’une étude menée par MENA Energy and Extractives Global Practice, en collaboration avec la Banque mondiale, a montré qu’en Tunisie, grâce aux énergies renouvelables, plus de 8 500 emplois directs seront créés d’ici 2030 et 17 000 emplois si l’on tient compte des emplois directs et indirects. Ce nombre serait quatre fois moins important pour une filière Gaz.
Elle souligne que ce résultat ne peut que nous encourager, en tant qu’investisseurs responsables de nous lancer dans des projets d’énergies renouvelables. Cependant, l’analyse et le choix des projets est à faire avec beaucoup de minutie. Le marché connaîtra un boom sans précédent. En effet, les projections de création d’emplois en énergies renouvelables à l’horizon 2030 parlent de 20 millions d’emplois.
Et de conclure: « La Tunisie doit chercher son positionnement en tant que fournisseur de formations et recherches adaptées (système d’enseignement supérieur, formation professionnelle, technopôles, laboratoires, etc.) et fournisseur d’études et de services (développement des bureaux d’études et d’un réseau d’experts). En somme, opter pour une approche régionale pour réussir la transition énergétique. D’où la nécessité d’établir un cadre politique régional clair de la transition énergétique pour permettre son financement conjoint ».