L’histoire des faits et de la pensée économique, au sujet des rapports entre la Tunisie et d’autres pays de la rive nord de la Méditerranée révèle une succession de péripéties où la symbiose est quasi-totale et d’autres fois où la sourde oreille, des deux côtés, s’empare des décideurs.
Nous vivons depuis quelques années déjà dans une atmosphère de craintes, voire de déceptions entrecoupées de rupture de dialogue, même si on ne cesse de parler de concertations et de « dialogue Nord-Sud ».
A propos de l’ALECA, les choses ne s’arrangent guère. De nombreuses organisations de la société civile craignent que « ce partenariat Nord – Sud soit établi sur des bases injustes et non durables loin de reproduire la même logique et les mêmes retombées de l’ancien accord de libre-échange de 1995 ».
Bref, tout y est et souvent à tort et à travers. De la Tunisie qui ne sait pas tirer les leçons des politiques adoptées sur les quatre dernières décennies ainsi que des politiques de partenariat antérieures. Seule certitude : « Faute de vision et d’une négociation pertinente du projet ALECA, la Tunisie court beaucoup de risques générés par l’adoption de choix inadaptés ».
Les échanges purement commerciaux privilégiés (marché potentiel pour les entreprises européennes) au détriment du transfert de technologie, de la recherche scientifique, des nouveaux métiers, de la bio-économie…ne peuvent que fragiliser les petites et moyennes entreprises peu préparées à un environnement intensément concurrentiel alors que les opérateurs européens ont, durant de longues années, été assistés par leurs gouvernements (ex. la politique agricole commune (PAC) et les politiques industrielles déclarées ou larvées). Mais il n’y a aucune fatalité à cette asymétrie. Autant activer la mise à niveau des secteurs concernés pour le grand bien de l’économie nationale.
Une ouverture non contrôlée des marchés publics aux firmes européennes mettra en grande difficulté les entreprises locales peu compétitives. A charge pour elles de se mettre à niveau. Un plan d’accompagnement et un programme de mise à niveau sont nécessaires pour muscler nos entreprises et repenser au besoin leur positionnement stratégique.
En outre, et afin d’inverser les tendances actuelles des relations économiques entre la Tunisie et l’UE, strictement commerciales, en faveur d’une approche de développement durable et d’inclusion sociale et régionale, il importe de rappeler que l’Europe, fortement liée socialement et économiquement à ses voisins, ne peut se développer en laissant à la traîne les pays du Sud.
Il serait également judicieux de rappeler que la Tunisie, fort ancrée dans sa modernité, ne peut évoluer qu’en adoptant un développement inclusif garant d’une réelle cohésion sociale. Aussi, considérons-nous qu’il urge au Nord comme au Sud d’agir ensemble pour un co-développement et non pas pour un rattrapage hypothétique.