Le pouvoir d’achat des Tunisiens qui s’effrite et baisse inexorablement est une réalité, et ce, depuis le début des années 2000.
Notre parité en pouvoir d’achat, PPA, dépassait, en 2001, de + 659 $ /an par habitant, celle du Groupe des pays à revenus intermédiaires-tranches supérieures. Inversion de tendance, depuis 2006, et surtout 2011, ce pouvoir d’achat n’a fait que chuter. Les statistiques internationales, de 2016, toujours par rapport au même Groupe de référence, évaluent sa régression de – 5 000 $ / par Tunisien / par an.
Dans ce même groupe, notre pouvoir d’achat qui était, dans les années 90, supérieur à celui du Pérou (33 millions d’habitants) et à celui de la République dominicaine (11 millions d’habitants), est aujourd’hui clairement inférieur.
C’est l’intelligence publique qui est en cause
Comment sommes-nous arrivés à régresser si gravement ? Bien entendu, des victoires et des avancées majeures nous en avons réalisées, nous en réaliserons. Mais la continuité, la bonne et la généreuse intelligence nous ont fait souvent défaut. Un siècle plutôt douloureux, un Protectorat, une insurrection par décennie, une révolution, cassures de richesses et instabilités.
Aujourd’hui, le dangereux malaise des impôts ressurgit. L’urgence est de sortir de la situation invraisemblable dans laquelle nous nous sommes de nouveau mis. D’un côté une population qui ressent la cherté et les complications au plus près de son quotidien, et de l’autre, une intelligence publique qui n’arrive pas à se parfaire.
Or dans une telle situation, c’est à l’intelligence de changer car il devient grand temps d’apporter au pays ses durables et bonnes solutions.
Changeons de lexique, de doctrine
Des mots et phrases clefs tels que les demandes de sacrifices, les déséquilibres financiers, la liquidité qui manque, les caisses sociales vides, le Dinar qui a glissé, les paies seront versées, ne galvanisent pas les énergies. Inhibent et conduisent aux arbitrages administratifs excessifs et aux blocages.
Avec une monnaie qui nous est propre, le Dinar, est-il possible que des considérations techniques absolues nous mènent vers des cessations de payements entre institutions, de liquidités bancaires ou de remboursements de soins ? Toutes nos précieuses chaînes nationales des métiers, des soins, de la prévoyance sociale, du financement de l’économie, se trouvent bousculées et risquent de se casser.
Tant sur le fond que sur la forme nous avons toujours courus, tête baissée, pour nous mettre en crise. Il s’agit de se reprendre, de croire en notre potentiel et de mener nos petits et grands programmes par nous-mêmes.
Fiscalité élevée ou endettement public. Mais bien sûr que la réponse adéquate est ni l’un, ni l’autre. La fiscalité s’évalue par rapport au PIB que vous avez. 15 à 17% du PIB, pour notre cas, devrait nous inciter à baisser, au plus vite, la charge fiscale d’un ordre d’au moins 5 milliards de dinars.
L’endettement public, nous en avons de la marge, beaucoup de marge. Les évaluations comparées et les statistiques internationales montrent que les créances gouvernementales tunisiennes, nettes des dépôts des institutions publiques, sont freinées dans une bande de 10% du PIB. Notre large marge s’étend donc du double au quadruple de ces niveaux historiques figés.
La priorité au PIB
Toute bonne méga lecture de notre économie conduirait à conclure que le plus pertinent objectif national à se fixer est plutôt, et prioritairement, l’augmentation du PIB.
Encore, une fois, la marge pour le faire existe. La banque et le marché, en sous crédits et financements, en seraient l’outil principal. Le PIB croîtra substantiellement par les crédits et les financements intérieurs, leurs corrélations sont réelles, fortes, et indiscutables.
Mettre le taux directeur BCT, à une valeur nulle, réduirait les taux des marges bancaires. Inciterait alors les banques à donner davantage de crédits. Laisser monter des banques mutuelles régionales, petites, en nombre, à capital initial raisonnable, développera notre intérieur, notre avenir économique de la Tunisie.
Cela ferait aussi gagner au Trésor, au Budget, des centaines de millions de Dinars/an en intérêts servis. Et allégera les charges de toutes les émissions obligataires privées.
Nous verrons émettre un BTA, 50 ans. Il le faut, c’est important pour favoriser l’investissement réel.
Voilà que c’est possible, une architecture intelligente, bien supervisée, qui aboutirait à des émissions hypothécaires au profit, et bonheur, des ménages tunisiens. De nos promoteurs aussi. Ils acquerront leurs logements sans apport initial, sur 20 à 30 ans, à hauteur de leur capacité de remboursements sans passer par des ministères ou des administrations, au plus bas taux, 1 à 1,5%.
Chacun jouera son rôle. La banque et la finance, les ministères, mais sans ligne ou budget de crédit, s’occuperont du précieux et souverain rôle qui est le leur.
D’autre part, dans cette architecture nouvelle, nous n’aurons pas à subventionner l’épargne comme nous le faisions déjà, sans effet, depuis 2008. Une fausse logique qui a conduit aujourd’hui à un taux de rémunération TRE de 5%.
Ce niveau ne fera que pousser le TMM, taux de référence pour les crédits bancaires, à augmenter davantage, nous le constatons de visu. Le marché financier et la Bourse ne tiendront pas devant un
TMM élevé, s’excluront du financement de l’économie. Et voilà que nous sommes alors dans l’architecture usée et stérile de l’avant crise du pain, des années 80. La fiscalité 2019 détonnera.
Seule donc une architecture redessinée, du financement de l’économie, par une politique monétaire et de taux adéquats, nous éloignerait, entre autres, des risques d’une nouvelle crise budgétaire majeure qui couve et qui se prépare et que j’ai pensé qu’il est important de signaler.