Parler de recherche clinique dans le monde des médicaments est une entreprise particulière à plus d’un titre du fait des enjeux technologiques qu’elle fait valoir et des défis scientifiques que le thème suggère immanquablement. Cela l’est encore plus quand le débat est placé dans le cadre de la coopération internationale et plus précisément dans le domaine des échanges public-privé en la matière.
Une table ronde traitant de tous ces aspects à travers le vécu de la coopération tuniso-suisse vient d’être dernièrement organisée à l’initiative de l’Ambassade de Suisse en Tunisie.
La qualité de la présence, composée pour l’essentiel de spécialistes et d’hommes d’affaires, la haute teneur scientifique des interventions et la pertinence des thématiques abordées ont contribué à faire de ce rendez-vous un moment d’échanges profitables aux deux parties suisse et tunisienne. Ainsi, les communications des quatre experts invités ont traité quelques-unes des particularités de la recherche clinique en matière de médicaments.
Modérée par Ahmed El Rhali, de l’entreprise suisse Datametrix AG, spécialisée en recherche clinique, analyse et gestion de données, la table ronde a enregistré les communications de Anis Klouz, Directeur de la recherche médicale au ministère de la Santé, de Yosra Kerkeni, Directeur médical au sein de l’entreprise suisse Roche en Tunisie, de Nicola Yste, responsable des relations publiques à Novartis Suisse et de Kamel Idir, consultant à la Banque mondiale et l’OMS. Un débat polyvalent touchant à de nombreux aspects des thématiques abordées a ponctué tout le déroulement de la table ronde.
Constat encourageant
En préambule, Rita Adam, ambassadeur de Suisse en Tunisie, a fait un tour d’’horizon exhaustif de la coopération entre les deux pays. Elle a tenu à rappeler à ce propos la qualité de la coopération, appelée à se multiplier et à se forger de nouvelles « avancées » aussi bien dans le domaine des biens que dans celui des services. L’exemple du développement du rapport des chefs d’entreprise suisses avec leurs partenaires tunisiens en est l’une des illustrations selon elle des plus marquantes. Et c’est bien à propos qu’elle a tenu à rappeler que l’ouverture sur le monde a de tout temps caractérisé la politique suisse en matière économique. En témoignent les 28 accords de libre-échange conclus avec des partenaires en dehors de l’Union Européenne et, dans le cas d’espèce, l’accord de libre-échange signé avec la Tunisie en 2005. Et c’est en toute logique que les choses en termes de coopération sont censés aller crescendo comme c’est le cas de la recherche clinique.
Le pari de l’innovation
Les communications lors de la table ronde ont toutes mis l’accent sur l’impératif de développer la coopération entre les secteurs public-privé dans le domaine de la recherche clinique, laquelle coopération est en train d’être réalisée, entre autres, par des fleurons en la matière, en l’occurrence les sociétés pharmaceutiques suisses, Datametrix AG , Novartis et Roche. Dans son intervention, Anis Klouz a réitéré les efforts accomplis par le ministère de la Santé pour encourager ce genre de coopération. Considérant à ce propos que le défi qui incombe à tous est de veiller constamment à prendre les dispositions conséquentes pour relever, dit-il, le pari de l’innovation. Et de souligner que la recherche est un véritable moteur pour la croissance, d’où l’impératif de mettre sur pied une stratégie pertinente. Pour cela, il importe de faire en sorte que les réglementations en vigueur soient mises à jour et adaptées aux objectifs fixés.
Le périple aux multiples défis
Le schéma, faut-il le rappeler, de mise en place d’une recherche clinique est aussi pointilleux que compliqué. La fragilité et la prouesse technique escomptée le légitiment. C’est un schéma aux innombrables défis, parsemés d’étapes qu’il importe de dépasser sans risque aucun de faille. Ainsi après la prise de l’initiative de l’étude par la firme pharmaceutique ou autres à condition de la qualification scientifique requise .une expertise préalable est réalisée et soumise pour avis.
Les étapes sont passées en revue une à une et l’on aborde alors un slalom d’une portée scientifique extrême pour la mise en application des stades de la recherche, lesquels sont réunis dans ce qu’il est commun d’appeler les BPC (les bonnes pratiques cliniques). Des avis multi-sectoriels sont donnés à ce propos en ce qui concerne l’intérêt médical et scientifique des résultats attendus. Ceci sans compter les différentes phases de l’expérimentation clinique (phase dite de la tolérance par la technique du dosage croissant de la molécule, phase d’étude de l’efficacité, phase des essais comparatifs et phase administrative).
Vers la recherche institutionnalisée
Les experts qui se sont relayés au micro de la table ronde ont développé les approches mises en application en matière de coopération des sociétés suisses avec les partenaires tunisiens. L’accent a été mis sur le fait que cette coopération est passée du stade des débuts où elle était fondée sur la ou les personnes qui les menaient à celui que l’on connaît aujourd’hui. Autrement dit, elle est passée du stade de la recherche « personnalisée » à une recherche institutionnalisée.
Cela a permis, comme c’est le cas pour Roche, d’ouvrir toutes grandes les portes de l’innovation. Des chiffres pour en témoigner : plus de 32 mille sites d’études cliniques, 1500 études sont en cours. Le but étant d’avoir 30 médicaments. C’est le cas aussi pour Novartis pour qui la recherche est le fer de lance de toute avancée dans le domaine technologique. Les résultats enregistrés à ce propos et plus particulièrement en matière de coopération sont plus que probants. Kamel Idir a, de son côté, insisté sur l’impératif de développer la recherche clinique. Il a initié son intervention par une question assez pertinente : notre industrie pharmaceutique doit-elle demeurer un fournisseur local ou, au contraire, se tourner vers l’étranger, particulièrement l’Afrique? La réponse est bien entendue évidente. La preuve dit-il, l’avancée de la coopération publique-privée en la matière.