Avec une inflation de 7,1%, nous pouvons affirmer que nous sommes bel et bien au début d’une spirale inflationniste dont les conséquences sont techniquement connues et, surtout, graves.
Pénétrer dans une telle dynamique est extrêmement simple, mais y sortir est une tâche ardue.
Inflation par la demande et par les coûts
« Cerise sur le gâteau » : une inflation sous-jacente de 7%. En d’autres termes, nous serons à ces niveaux élevés pour une bonne période.
Les conséquences ne sont pas à rappeler. Les entreprises vont payer plus de charges financières sur leurs encours de dettes octroyées à taux variables (suite à de la révision du taux directeur), et les ménages vont voir leur pouvoir d’achat s’effriter davantage. Et une question se pose: Est-ce que les Tunisiens vont devoir s’habituer à vivre avec l’inflation?
La réponse est clairement un oui. L’inflation en Tunisie est le produit d’un cocktail explosif. En effet, juste après la révolution, la hausse des prix était causée par une explosion de la demande suite à une série de revalorisations salariales importantes. Pour lutter contre une tel phénomène, il fallait suivre le modèle de Keynes : augmenter le nombre d’offreurs et diminuer le nombre de demandeurs.
Aucune solution n’a été appliquée. Pire encore, les conditions sociales se sont dégradées avec la multiplication des grèves qui revendiquent, encore, des augmentations de revenus! Ainsi, le nombre de producteurs a même diminué et la demande a explosé avec un pouvoir d’achat amélioré.
Progressivement, cette inflation est venue plutôt par les coûts. Les déséquilibres macroéconomiques se sont effondrés, et les coûts des intrants importés ont flambé avec la glissade du dinar, sans oublier la lourdeur du coût de l’emploi. Ainsi, les prix de tous les produits et services se sont accrus créant une inflation par les coûts. Ce type d’inflation est plus grave car il finira par une spirale inflationniste : L’augmentation des salaires induit une augmentation des prix, qui entraîne une revendication de hausse de rémunération pour maintenir le pouvoir d’achat, un vrai cercle vicieux.
Inflation structurelle
L’existence d’un système généreux de protection sociale et de marchés monopolistiques crée une hausse des prix. L’intervention excessive de l’Etat dans l’économie, comme c’est notre cas, entrave le fonctionnement des marchés et le mécanisme de la concurrence qui met les prix sous pression.
En Tunisie, l’Etat assure aujourd’hui la fourniture de l’électricité, de l’eau potable, des services hospitaliers, contrôle les différents Offices et oriente la formation de prix. Certes, plusieurs services sont subventionnés, mais cela pèse sur le budget de l’Etat et revient sous une forme d’inflation. Cette dernière est donc le prix « à payer » pour la cohésion sociale.
D’autre part, l’inflation est l’une des conséquences du chômage. Aujourd’hui, le nombre de personnes qui n’ont pas trouvé de travail explose, montrant le manque de flexibilité du marché de l’emploi et de l’incapacité des institutions à fournir la main-d’œuvre nécessaire aux entreprises pour atteindre l’équilibre des prix.
Une inflation bénéfique?
Une petite dose d’inflation est toujours bonne. D’ailleurs, nos voisins européens font tout depuis des années pour la créer, tout en sachant que nous sommes en train de parler d’un seuil ne dépassant pas les 2%. Avec nos chiffres actuels, plus rien n’est bon. En effet, en période d’inflation, les entreprises sont d’autant plus incitées à recourir au financement externe que leurs taux de profit internes sont supérieurs au taux d’intérêt des capitaux empruntés. Mais est-ce que cela est vérifié avec une inflation de 7% et un taux directeur à 5,75%? Nous ne pouvons donc plus parler d’un effet de levier.
De plus, l’inflation est censée stimuler les entreprises par les perspectives de gains, constituant de la sorte un moteur d’investissement qui induit une croissance de la production et de l’emploi. Mais si on est à une très forte pression sur les entreprises, et si la consommation bat de l’aile et se concentre de plus en plus sur les produits de première nécessité, il est difficile de voir les investissements repartir à la hausse.
Nous sommes donc condamnés à vivre avec une inflation galopante. Les décisions qui peuvent réduire réellement l’inflation sont très douloureuses pour une population qui ne supporte plus rien. Mais ce qui est sûr, c’est que toute solution commence par une chose : le travail. Si nous voulons vivre mieux, nous devons bosser plus, beaucoup plus.
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