Quand Donald Trump, son ministre des Affaires étrangères Mike Pompeo, son conseiller à la sécurité nationale, John Bolton, font cause commune avec le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu, cela n’augure rien de bon. Tous les quatre font une fixation pathologique sur l’Iran et semblent perdre le sommeil tant que le régime iranien d’Ali Khamenei n’a pas subi le sort du régime irakien de Saddam Hussein.
En 2002, George W. Bush, son adjoint Dick Cheney, son ministre des Affaires étrangères, Colin Powell, son ministre de la Défense, Donald Rumsfeld, et sa conseillère pour la sécurité nationale Condoleezza Rice faisaient eux aussi cause commune avec le même Netanyahu, l’indétrônable Premier ministre israélien.
En septembre 2002, alors que la campagne hystérique contre l’Irak de Saddam Hussein battait son plein, et alors que les inspecteurs de l’ONU concluaient à l’inexistence d’armes de destruction massive, Netanyahu s’adressait au Congrès américain en ces termes : «Il n’y a absolument aucun doute que Saddam Hussein est en train de développer un arsenal d’armes nucléaires. Aucun doute là-dessus.»
Les drames innommables et l’explosion planétaire du terrorisme engendrés par la destruction du régime de Saddam Hussein ont pour origine l’entente des establishments américain et israélien et leur détermination à détruire l’Irak qu’ils considéraient comme «un danger mortel pour Israël et une menace pour la paix mondiale».
La même entente de ces deux establishments contre l’Irak en 2002 est en train de se reproduire seize ans plus tard contre l’Iran. La seule différence est que nous avons Trump à la place de Bush, Pompeo à la place de Powell, Bolton à la place de Rice et Mattis à la place de Rumsfeld. L’indétrônable Netanyahu est toujours là et ne semble pas prêt à prendre sa retraite avant de régler son compte avec l’Iran. Et il est d’autant plus encouragé et enhardi dans sa mission guerrière que les décideurs à la Maison-Blanche, au Département d’Etat et au Pentagone sont, s’agissant de l’Iran, aussi hystériques que lui.
Dans un discours, lundi 30 avril, Netanyahu a dit que son pays dispose de la «preuve irréfutable» que l’Iran est en train de violer les termes de l’accord nucléaire. Présentation Power Point à l’appui, Netanyahu a présenté des graphiques et des photographies aériennes qui, selon lui, montrent «les mensonges et les tricheries» de l’Iran qui poursuit son programme de développement de missiles nucléaires ‘’Amad’’. Toujours selon Netanyahu, «un grand coup du Mossad» a permis à Israël de mettre la main sur «des dizaines de milliers de documents pesant une demi tonne et prouvant que l’Iran a menti de manière éhontée à la Communauté internationale».
Bien sûr, le monde est prié de croire sur parole «les preuves» du Mossad et les discours de Netanyahu. Le monde est prié d’écarter d’un revers de main le fait que le Mossad est capable des manœuvres les plus extravagantes et des trucages les plus ardus de nature à rendre crédibles les inventions les plus incongrues. Le monde est prié également de ne pas faire le parallèle entre les discours de Netanyahu sur l’Irak en 2002 et ses discours sur l’Iran en 2018.
Loin des discours mensongers de Netanyahu, des tweets puérils de Trump et des vociférations hystériques de Bolton et Pompeo, deux vérités méritent d’être soulignées :
- En toute objectivité et sans être partisan de l’islam politique, on peut dire qu’en trois millénaires d’existence, l’Iran n’a jamais fait preuve d’agressivité ni d’expansionnisme vis-à-vis de ses voisins pour leur imposer sa langue et sa culture. Bien au contraire, au cours de sa longue histoire ce pays a souvent été victime de l’expansionnisme de ses voisins arabes ou des tendances dominatrices de puissances lointaines et qui, jusqu’à ce jour, ne fait que se défendre. De l’autre côté et en 70 ans d’existence, Israël n’a pas arrêté de conquérir des terres qui ne lui appartiennent pas, de déclencher des guerres d’agression contre pratiquement tous ses voisins et de se complaire dans son rôle de vecteur d’instabilité et de désordre dans la région.
- L’Amérique qui n’arrête pas de bomber le torse et de s’obstiner à croire qu’elle est en mesure de plier le monde entier à sa volonté refuse toujours de voir la vérité en face. Et c’est normal, car cette vérité est stressante et même déprimante pour un pays qui persiste à débourser pour son armée un budget annuel de 700 milliards de dollars par an. Et cette vérité est que l’Amérique, depuis le second conflit mondial, n’a pas gagné une seule guerre. En dépit de sa puissance de feu sans égale dans l’histoire, elle a été battue et humiliée au Vietnam; dix sept ans après, elle ne sait toujours pas comment venir à bout de quelques milliers de fanatiques et de pacifier les montagnes afghanes; quinze ans après avoir ouvert les portes de l’enfer sur l’Irak et sur la région, l’Amérique semble avoir perdu la tête en combattant à la fois ses créatures terroristes à côté du gouvernement irakien, et en combattant le gouvernement syrien à côté de ses terroristes…
La solution pour Trump & Co et Netanyahu & Co pour régler les problèmes inextricables d’une région en feu et assurer la paix dans le monde ? Une guerre contre l’Iran. Voici où en est le monde aujourd’hui. Et le peuple américain dans tout ça? Il se soucie comme d’une guigne que le monde brûle ou se noie pourvu que l’Amérique se porte bien.