Les experts du FMI, qui– et sans grossir le trait et sans faire de populisme- envisagent les potions magiques d’un libéralisme pur et dur sans se soucier du quotidien des sociétés qu’elles visitent, notamment des classes pauvres et moyennes, croient qu’il n’y a qu’à appliquer les réformes pour améliorer ce quotidien pour plus tard. L’essentiel est de respecter l’orthodoxie capitaliste.
Evidement, on pourra se gargariser de grandes déclarations du genre: «C’est nous qui sommes allés demander l’aide du Fonds Monétaire International (FMI) et non ce dernier qui est venu vers nous», «Il n’y avait d’autres choix que d’aller au FMI: ses interventions sont les moins chères», «le FMI a une expertise qui ne peut que nous aider à dépasser la crise»,…
Certes. Mais, le fait est là: le FMI n’est pas toujours le bienvenu. Cette institution qui, il ne faut ni l’oublier ni encore le cacher, est sortie des cartons des ingénieurs libéraux d’une Amérique triomphante du nazisme après la Seconde Guerre mondiale et matérialisée par les Accords de Bretton Woods.
A l’heure où une bonne partie de l’opinion croule sous des difficultés pour joindre les deux bouts, nées des injonctions du FMI qui ne pense qu’à deux choses: pouvoir récupérer tout l’argent prêté– ce qui est somme toute légitime de la part d’un organisme financier- mais aussi défendre la libre- entreprise avec ce qui va comme crédo du libéralisme, il ne faut pas s’empêcher de dire que tout ne va pas pour le mieux lorsque cette institution financière conseille ou s’empare d’un pays.
Satisfaire aux diktats du FMI
La question mérite également d’être posée lorsqu’on sait que rien ne semble arrêter cette quête du FMI de pratiquer la vérité des prix et de casser toute politique qui tend à pratiquer une compensation d’où qu’elle vienne. Des augmentations de prix sont prévues chez nous et sans compensation au niveau des salaires. Même si le bon peuple peut crever. De toute façon, avec le FMI c’est, semble-t-il, quasiment du: «Marche ou crève».
A ce propos, ce qui se passe à l’heure où nous sommes en Jordanie doit nous obliger à réfléchir sur la réalité de cette institution. Ce pays, qui est allé, à son tour, voir du côté de cette institution, dont le siège est à Washington D.C. et où les États-Unis à eux seuls détiennent 17% des voix (189 pays peuplent le FMI) et qui a fait de la déréglementation du marché du travail un credo, vit une réelle instabilité.
En raison de la volonté du gouvernement de Hani Moulki d’imposer une hausse des prix (encore la vérité des prix) et des impôts (5% pour les particuliers et entre 20 et 40% pour les entreprises). Le prix à payer pour satisfaire aux diktats du FMI qui veut ramener la dette publique à 77% du PIB d’ici 2021, contre 94% en 2015.
Et les manifestations continuent
Des manifestations de milliers de personnes– dont certaines nocturnes- ont été organisées à partir du 31 mai 2018 à Amman (la capitale), mais aussi à Zarqa et à Balqa (Est), à Maan, à Karak (Sud), à Mafraq, à Irbid et à Jerach (Nord). Et les manifestations continuent. Avec interventions des forces de l’ordre.
De quoi faire agir le roi Abdallah II qui a ordonné d’annuler la décision prise, quelques jours auparavant, portant sur une majoration des prix des carburants, une des mesures prônées pour pratiquer cette vérité des prix.
Evidemment, les experts du FMI, qui– et sans grossir le trait et sans faire du populisme- envisagent les potions magiques d’un libéralisme pur et dur sans se soucier du quotidien des sociétés qu’ils visitent, notamment des classes notamment pauvres et moyennes, croient toujours qu’il n’y a qu’à appliquer les réformes pour améliorer ce quotidien pour plus tard. L’essentiel est de respecter l’orthodoxie capitaliste.
Il est utile de faire remarquer– et comme on l’a dit plus d’une fois- que ces potions ne sont pas aussi magiques que cela. Voilà ce que nous dit l’économiste allemand Jörg Guido Hülsmann dans un article très connu sur l’action du FMI en Afrique («Pourquoi le FMI nuit-il aux Africains?»
«On peut très bien se passer du FMI. Sa suppression immédiate serait certes déplorable du point de vue des classes politiques, mais bénéficierait à la large majorité des populations en Occident et en Afrique.»
Les Tunisiens n’oublieront pas de sitôt que les événements ou les émeutes du «pain» du 3 janvier 1984, et qui ont fait quelque 100 morts, sont consécutives à «une demande du Fonds monétaire international de stabiliser l’économie tunisienne (voir Sophie Chautard, «Les dictateurs du XXe siècle», édition Studyrama, Levallois-Perret, 2006).