Le travail, facteur d’épanouissement et d’accomplissement personnel, peut dans certains cas prendre d’autres tournures. S’il est évident que maladie et travail ne font pas bon ménage, les travailleurs atteints de dépression souffrent davantage de préjugés, au point d’en devenir tabou dans le milieu professionnel.
Un sondage Odoxa, réalisé auprès d’un échantillon de 2 026 Français représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, parmi lesquels 1 083 salariés, montre qu’en termes de connaissance et de sensibilisation vis-à-vis de cette maladie, un long chemin reste encore à parcourir.
La dépression est une maladie difficile à évoquer dans le milieu professionnel, voire un sujet à éviter d’après le sondage. Une faible proportion comprenant 22 % des interrogés en parlerait avec leurs collègues, 19% avec leur supérieur hiérarchique et 17% avec leur responsable des ressources humaines. Ainsi, les ouvriers et les employés seraient les plus réticents à évoquer le sujet dans leur environnement professionnel.
D’après les personnes interrogées, le cancer serait un sujet beaucoup plus facile à évoquer. En effet, dans l’éventualité qu’ils soient atteints d’un cancer ils seraient entre 17 et 21 points de plus à s’en entretenir avec leur entourage personnel et professionnel, sachant que ceux qui en parleraient «certainement» sont deux à trois fois plus nombreux que ceux qui parleraient de dépression s’ils en étaient atteints.
Les personnes touchées par la dépression sont fragiles
Ces préjugés particulièrement tenaces reviennent à la perception même de la maladie, vécue comme une «cassure» irrémédiable. D’après le sondage, 57% des Français pensent que la dépression laisse des séquelles. Les salariés considèrent que les personnes touchées par la dépression sont fragiles. Quant aux performances professionnelles, celles des personnes atteintes de dépression seraient moins bonnes. Ainsi, les salariés s’ils devaient collaborer/travailler avec une personne ayant connu un ou des épisodes dépressifs se diraient que cette personne risque d’être psychologiquement fragile (78%), de connaître de nouveaux épisodes dépressifs (74%), de nécessiter une attention supérieure (73%).
Dans un monde exigeant toujours plus de productivité et de performance, la dépression est perçue comme un frein. Elena Ruiz, ex DRH du groupe Canal Plus et ex-Chief Happiness Officer de Paris 2024 explique à cet effet: «Les idées reçues subsistent, notamment la crainte de se retrouver mis à l’écart».
La tendance qu’ont les travailleurs à taire leur dépression par peur d’être exclus pourrait constituer un volet crucial sur lequel il est possible d’agir efficacement par un travail d’information et de prévention. Mais le plus dur est comment faire en sorte que la confiance s’installe entre collaborateurs?