Les soulèvements populaires dans le monde arabe, hier, l’intensification et l’accélération des mouvements migratoires, aujourd’hui, sont en partie liés au phénomène de réchauffement climatique. L’environnement de l’Homme pèse sur son comportement politique et social. Dès lors les changements climatiques ne peuvent qu’impacter les sociétés humaines.
Les pays du Maghreb sont parmi les plus touchés par la hausse des températures et la multiplication des périodes de canicule. Si les émissions de gaz à effet de serre sont les principales sources de pollution de l’air, l’évolution des données climatiques est préoccupante pour l’avenir de la région. Un climat plus sec – avec des vagues de chaleur plus longues et plus étendues – qui tend à fragiliser plus encore l’ordre socio-politique des Etats de la région confrontés à une série de fléaux.
Changement climatique et gestion hydrique
La ressource en eau est mal répartie dans l’espace et dans le temps, ce qui a rendu nécessaire la construction de centaines de barrages et de canaux pour stocker l’eau et la transférer d’une région à l’autre. Du fait de la croissance de la demande en eau agricole et urbaine et de la rareté des ressources, les pays du Maghreb ont à gérer des situations de stress hydrique, certaines populations locales subissant une véritable pénurie d’eau. L’accès à l’eau de qualité demeure un défi pour certains, tandis que les coupures d’eau sont devenues une réalité quotidienne pour d’autres. L’aridité des régions déjà arides s’accroît. Selon une étude de l’université du Maryland publiée dans le Journal of Climate, le Sahara, plus grand désert du monde, s’est étendu de 10% en un peu moins d’un siècle. Une expansion qui serait liée en partie au réchauffement climatique (Science et Avenir, 12 avril 2018).
Or l’augmentation des pénuries d’eau est synonyme aussi d’insécurité alimentaire. La conjonction de l’augmentation des températures, de pluies plus sporadiques et de sécheresses plus fréquentes induit en effet une multiplication des mauvaises récoltes et une baisse des rendements. L’effet combiné de la rareté des ressources hydriques, du changement climatique et de la dégradation des terres arables, la FAO et l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pèsent fortement sur les perspectives agricoles 2018-2027, une baisse de la production agricole de 21% par rapport à 2009 dans la région de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient (MENA). Dans cette région, la progression de la production agricole, pour la même période, ne devrait être que d’environ 1,5% par an. Ce qui risque de renforcer la situation de forte dépendance des importations alimentaires des pays concernés.
Malgré une situation globale qui ne cesse de se dégrader, le déficit d’action nationale et régionale demeure. Certes, il existe bien quelques projets ou initiatives spectaculaires, mais la solution réside aussi au niveau local. Il faut ainsi saluer et soutenir les différentes initiatives citoyennes qui émergent dans la région. Celles-ci exigent une implication des pouvoirs publics et une responsabilisation des industriels. Plus largement, c’est le modèle économique et social de ces pays qui devrait être repensé à l’aune de la nouvelle donne climatique. Les sociétés civiles sont également appelées à faire leur mue et à s’engager dans un mode de vie prenant en considération le changement de leur propre environnement. Plus qu’une contrainte, il y a là une opportunité pour les pays du Maghreb au regard du potentiel que recèlent leurs territoires en termes d’énergies éoliennes et solaires. De la capacité de réaction politique des pays concernés par la multiplication des périodes de sécheresse et l’accroissement de la pression démographique, dépendra le développement, la sécurité et la stabilité du Maghreb de ce début de XXIe siècle…