Le fondateur et le directeur général du groupe Comete Engineering, Radhi Meddeb, donne son éclairage à leconomistemaghrebin.com sur la diplomatie économique tunisienne.
En marge de l’ouverture de la Journée économique annuelle des présidents des missions diplomatiques et consulaires, tenue hier 30 juillet au Cepex, Radhi Meddeb a commencé son analyse en rappelant que la Tunisie a depuis quelque temps un secrétaire d’Etat à la Diplomatie économique «et cela suppose qu’on en a une», considère-t-il.
Pour lui, aujourd’hui, la politique, la diplomatie partout ailleurs dans le monde ne tournent qu’autour d’un seul thème, à savoir l’économie, la géopolitique au service de l’économie. «Nous ne sommes pas encore dans cette approche en Tunisie mais il existe des tentatives et elles sont à saluer parce que cela montre qu’on est dans la bonne direction», regrette-t-il.
Radhi Meddeb a affirmé «qui dit diplomatie économique tunisienne dit nécessairement une stratégie au service de laquelle se met la diplomatie. Aujourd’hui, quand on examine le positionnement géopolitique de la Tunisie, on se demande quelle est notre vision, quelle est notre souhait? Voulons-nous continuer à approfondir notre amarrage à l’Europe? Voulons-nous approfondir nos relations avec l’Afrique? Voulons-nous aller vers les pays du Golfe? Que voulons-nous faire?», s’interroge le spécialiste.
Pour lui, ces questions sont légitimes vu l’existence de tiraillements: «Pour moi, les choses sont claires. Nous partons de notre réalité économique aujourd’hui. Nous savons tous que la Tunisie réalise 80% de ses exportations sur l’Europe et 80% de ces 80% sont orientés vers trois pays européens, à savoir la France, l’Allemagne et l’Italie».
Revenant sur le continent africain, il a tenu à apporter quelques précisions sur quelques «bonnes fausses idées». La première fausse bonne idée est que l’Afrique peut être une alternative à notre commerce avec l’Europe. «C’est faux parce que l’Afrique est faite de 54 pays et l’ensemble du PIB de ces 54 pays est égale à 80% du produit intérieur brut de la France. Certes, l’Afrique est un continent en émergence mais c’est un continent où la profondeur économique n’existe pas encore», regrette-il.
De même, il a rappelé qu’on ne vend pas en Afrique ce que nous vendons à d’autres destinations. A cet égard, il a rappelé que le continent africain n’est pas demandeur de plusieurs produits tunisiens à l’instar du textile et faisceaux de câble. Il rappelle qu’on n’a même pas la possibilité de vendre les excédents de l’huile d’olive ou d’agrumes aux pays africains, quand la récolte est bonne.
Le président du groupe a affirmé que «nous devons nous diriger vers l’Afrique pour voir ce dont elle a besoin et non pas lui imposer nos excédents», recommande-t-il. Et de noter que le pouvoir d’achat en Afrique demeure faible, raison pour la quelle la production tunisienne doit être adaptée en termes de spécifications technique et conditionnement aux besoins de l’Afrique.
Un autre travail se pose au niveau de la logistique pour aller en Afrique,recommande notre interlocuteur. «Tout cela fait que l’Afrique est un continent émergent et en croissance rapide et pour lequel nous ne sommes pas encore bien positionnés. Il faut préparer notre approche pour mieux pénétrer le marché africain. Notre marché essentiel et qui le restera pour longtemps encore est l’Europe», conclut-il.
Radhi Meddeb : de la nécessité de booster la diplomatie économique tunisienne
Sur l’Europe des 28, nous n’exportons que vers trois pays: l’Allemagne, la France et l’Italie. «Pour l’Allemagne à titre d’exemple, ce n’est pas les Tunisiens qui exportent. Les Allemands viennent en Tunisie pour produire et exporter vers leur pays. Nous ne connaissons pas pour les autres 25 pays les circuits de distribution, les donneurs d’ordre, les spécifications techniques, les organisation institutionnelles de ces pays, nous n’avons aucune idée sur le potentiel des marchés de ces 25 marchés, pays par pays alors que la porte est ouverte à nos produits industriels», lance-t-il.
Pour l’Afrique, elle demeure une opportunité davantage en matière de services qu’ en matière de biens. «En matière de services, nous vendons des salaires multipliés par des coefficients et là nous avons un avantage compétitif tellement important par rapport à l’Europe et l’Occident en général», explique-t-il.
La diplomatie économique tunisienne doit tenir compte de tout cela et déployer une stratégie d’actions publiques. Il a rappelé que des entreprises tunisiennes sont présentes en Afrique depuis plus de 30 ans et n’ont pas attendu l’aide ou l’intervention de l’Etat. «Par contre, ils attendent que des conventions de non-double imposition soient mises en place avec les différents pays africains. Il existe un seul pays africain qui dispose de 53 convention de non-double imposition, à savoir l’île Maurice et cela rejaillit sur ses rapports avec le reste du monde», conclut-il.