Fils d’un grand propriétaire terrien, Si Abdelkarim Chida, féru de culture, d’archéologie et de développement social et solidaire s’est distingué, durant toute sa vie, par son dévouement à la ville du Kef et par son bénévolat au service des zones enclavées de la région.
Féru de culture et d’archéologie
Durant les années 60-70, il fut secrétaire général de la municipalité du Kef, président du comité culturel, président du festival de Jugurtha, président de l’Association de sauvegarde de la médina du Kef.
C’est au cours de cette période que la troupe de théâtre du Kef a connu son apogée et son rayonnement à travers tout le pays et que la ville du Kef a accueilli d’éminents archéologues hollandais, français et allemands.
C’est à cette époque également que Bourguiba, qui disposait d’un palais au Kef, avait dit « je suis un Jugurtha qui a réussi » et pris, en 1968, lors du 2ème congrès des comités culturels régionaux au Kef, l’audacieuse décision de créer un fonds budgétaire dédié au financement des activités culturelles. C’était une véritable révolution à l’époque.
Un des pionniers de l’économie solidaire et sociale
Mais c’est en sa qualité d’un des pionniers du développement social et solidaire et de la microfinance que le défunt a beaucoup fait pour les pauvres de la région du Kef.
Après avoir été, durant les années 70, un des principaux animateurs de l’Association pour la promotion de l’emploi et du logement (A.P.E.L.), il créa, en 1985, avec sa compagne, l’Américaine Amina Madlon Davies, la Fondation El Kef pour le développement régional (FEKD).
Cette organisation non-gouvernementale a aidé des communautés vulnérables de zones rurales enclavées (femmes et enfants), à l’instar des agglomérations de Nebeur, Bahra, Sidi Medien, Dyr, Mahassen, Bir Héddi, Takrouna -Sakiet Sidi Youssef … à s’auto-développer et à améliorer leurs conditions de vie.
L’assistance multiforme apportée par la FEKD a consisté en l’alimentation en eau potable (captation de sources naturelles), octroi de micro – crédits, création de cantines scolaires capables de s’auto-approvisionner, amélioration de logements, diversification de l’arboriculture fruitière, planning familial, promotion de l’artisanat local, appui aux initiatives de développement local et création d’emplois, écotourisme …
Pour financer toutes ses interventions Si Abdelkerim Chida a tissé des relations de partenariat avec des ONG hollandaise, belge, canadienne, française (Associations CEVIED, ARVEL et HENDI à Lyon), et des agences spécialisées de l’ONU (Unicef, Unfpa…)
Initiateur d’une chaîne de solidarité pour sauver des enfants pauvres
Point d’orgue de ce partenariat, le Programme national de l’opération à coeur ouvert en partenariat avec Terre des Hommes –Pays –Bas et Ministère de la Santé (1985-1995).
Le défunt a créé toute une chaîne de solidarité pour aider des enfants tunisiens souffrant de troubles cardiaques à se faire opérer à coeur ouvert gratuitement à Delft aux Pays-Bas.
Ainsi, la FEKD identifie les enfants, les médecins de la santé publique confectionnent le dossier médical, le ministère des Affaires sociales détache des assistantes sociales pour accompagner les enfants malades, le transporteur public Tunisair assure gratuitement le transport et l’ONG hollandaise prend en charge les frais de l’opération à coeur ouvert à Delft. Quelque 200 enfants issus de milieux défavorisés de tout le pays ont bénéficié de ce programme.
Le devoir de mémoire nous a imposé de raconter cette belle histoire de solidarité qui vient illustrer de manière éloquente les qualités exceptionnelles du défunt Abdelkarim Chida. C’est l’exemple type du grand militant bénévole qui a beaucoup servi et qui ne s’est jamais servi. Paix à son âme.