Que faut-il penser du remaniement annoncé ? Pourrait-il mettre fin à la crise politique et traiter le différend entre Carthage, la Kasbah, Montplaisir et le Lac ? Serait-il en mesure d’atténuer la colère des Tunisiens, suite à leurs désillusions ? Est-il opportun dans ces conditions ?
La crise politique, qui traduit la guerre entre les acteurs, ne saurait être réglée par les repositionnements conjoncturels et tactiques. L’alliance de fait d’Ennahdha avec le chef du gouvernement, après l’annonce de la fin de connivence entre les deux cheikhs, brouille les cartes. Le processus de modernisation, clef de voûte du parti Nidaa, trébuche évidemment. Le rapprochement de la coalition parlementaire, pro-Chahed, des positions parlementaires de Ennahdha, affaiblit les velléités de formation d’une alternative d’ouverture et de progrès. La guerre des charges ministérielles vide les programmes politiques de leurs contenus. On laisse désormais les discours génériques aux vestiaires. L’avion gouvernemental a désormais un pilote, sans boussole. Prenons la juste mesure de la situation.
Un remaniement ministériel pour quoi faire ?
Le remaniement– s’il est effectivement réalisé, vu l’éventuel refus du président!– ne pourrait mettre fin à la discorde entre Carthage et la Kasbah. Le d Président de la République a formulé un diagnostic, le 29 octobre 2018, après l’attentat-suicide perpétré à l’avenue Habib Bourguiba à Tunis très explicite. Il l’explique par le « mauvais climat politique. On est occupé par les postes et les tiraillements, omettant l’essentiel : la sécurité des citoyens… Les responsables, non seulement du gouvernement, mais aussi des partis politiques doivent tirer les leçons de ce qui s’est passé, puisque le terrorisme n’est pas uniquement dans les montagnes, mais bien installé dans la capitale. Il va falloir savoir répondre aux aspirations des citoyens et répondre à leurs revendications ». La critique s’adresse au gouvernement. Mais elle concerne l’ensemble des acteurs, plutôt préoccupés, eux tous, par l’horizon électoral de 2019 et la satisfaction de leurs candidats.
D’autre part, les dirigeants du gouvernement et des partis évoquent régulièrement sur les plateaux de télévisions, le traitement de la question du pouvoir d’achat. En fait cette question est occultée dans les programmes. De même, les attentes des citoyens ne sont pas satisfaites. D’ailleurs, le remaniement annoncé n’a pas de portée réelle. On prend les mêmes et on recommence, à quelques unités prés. La Constitution de 2014 ne prévoit pas de remaniement, dans ces conditions. De ce fait, la réduction du nombre des ministères (plus de 50 actuellement, avec les nombreux conseillers disposant d’avantages ministériaux) n’est pas à l’ordre du jour. Que faudrait-il répondre aux observateurs qui évoquent un gouvernement de compétences, d’une quinzaine de membres ?