La fluctuation du change avec la baisse de la valeur du dinar tunisien par rapport aux devises étrangères a lourdement impacté la rentabilité des entreprises tunisiennes. Leurs chiffres d’affaires ont nettement diminué ces dernières années. Les entreprises tunisiennes butent aussi sur moult difficultés réglementaires.
L’ouverture des comptes en devises à l’étranger, la caution bancaire, des difficultés réglementaires empêchent les entreprises de bénéficier de l’intégration monétaire. En outre, l’interdiction d’ouverture de comptes à l’étranger par les entreprises titulaires de marchés, l’autorisation préalable de garanties internationales de groupements, l’absence de textes régissant les paiements électroniques internationaux sont aujourd’hui les principales préoccupations des opérateurs économiques liées à la réglementation des changes.
Ces points ont été évoqués aujourd’hui lors d’un panel sur la réglementation des changes et la politique monétaire, organisé dans le cadre des travaux de la 33ème édition des Journées de l’entreprise. Ce panel a mis aussi en exergue les leviers à actionner pour améliorer la situation.
A cette occasion, Marouane El Abassi, gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, a dévoilé un ensemble de mesures dont la refonte s’impose. Cependant, étant donné ses prérogatives, la BCT n’est pas en mesure de procéder à cette refonte toute seule. Car cette dernière est liée à une situation macroéconomique difficile malgré l’émergence de signes de reprise.
Ainsi, la BCT a mis en place un Comité consultatif sur la réglementation des changes pour éliminer les rigidités opérationnelles. Le gouverneur de la BCT a, par ailleurs, dévoilé les mesures d’assouplissement en cours relevant des prérogatives de la BCT et qui répondent aux préoccupations des opérateurs économiques. Il s’agit notamment de :
– La digitalisation de la fiche d’investissement constituant la condition essentielle pour le bénéfice de la garantie de transfert par l’investisseur étranger
– La clarification, par une circulaire dédiée, des conditions de réalisation de l’investissement et le transfert du produit de sa cession et de sa liquidation
– L’institution en faveur des startup d’un compte spécial crédité et débité en devises sans restrictions dans le cadre de leurs activités
– Le relèvement de 10 à 100 mD du plafond transférable par carte technologique internationale
– Relèvement de 30 à 90 jours du délai de règlement des exportations payables au comptant
– Règlement d’avance avec plafond des importations des biens liés à la production
Des mesures urgentes seront prises incessamment par le ministère des Finances pour assurer l’équilibre du Fonds de péréquation de change à travers le relèvement de la prime payée par les banques et la révision à la hausse des commissions sur découvert bancaire.
Le gouverneur de la BCT n’a pas manqué de préciser que la refonte du code des changes en 2019 devrait privilégier le contrôle a posteriori.
Par la même occasion, le gouverneur de la BCT a mis l’accent sur la difficulté que rencontre l’économie tunisienne à travers la présentation de plusieurs indicateurs comme le déficit commercial, le déficit courant, le taux d’endettement, la dépréciation du dinar et l’inflation.
Il a, dans ce contexte, déclaré que l’inflation, à titre d’exemple, atteindra 7,4% et elle baisserait en 2019. « Aujourd’hui, on s’engage dans des réformes importants en peu temps. Mon grand souci est de changer de palier au niveau de l’inflation. Sans intervention active de la BCT, l’inflation aurait été encore plus élevée et sans doute, à deux chiffres. Il fallait travailler sur l’économie réelle pour changer les courbes », a ajouté Marouen El Abassi.
Commentant ces mesures, Ali Kooli, directeur général de l’ABC Bank, a souligné que le système de contrôle des changes date de l’indépendance et ne répond pas aux exigences et aux préoccupations du moment.
« Le mur bâtit pour protéger l’économie nationale est devenu une véritable contrainte. Il faut arrêter les mesurettes », a-t-il dit.