C’est officiel : Carthage Cement ne sera pas vendue cette année. Bien qu’aucun communiqué n’ait été publié par Al Karama Holding, différentes sources ont confirmé que le processus de vente de la société n’a pas abouti. Une très mauvaise nouvelle pour le marché actions tunisien.
Le Tunindex risque de souffrir
Après trois mois très difficiles pour la Place de Tunis, le début du mois de décembre a été très positif. Le Tunindex a gagné 1,30% dans un volume moyen de 23,481 millions de dinars pour la première semaine du mois. L’indice s’est rapproché des 7 400 points, un niveau qu’il avait même atteint au début de la semaine avant de corriger. La Bourse de Tunis a bénéficié de la reprise des banques, un secteur qui a gagné 2,43%. Il est donc à l’origine de plus de 90% de la hausse hebdomadaire.
Le mois de décembre, connu pour ses opérations de Window dressing, est historiquement une période peu mouvementée côté volume, mais très bonne en termes de performance des petites et mid caps. Mais avec la nouvelle du vendredi, les prochaines semaines s’annoncent mal. Carthage Cement est l’une des entreprises les plus endettée. Selon ses derniers indicateurs d’activité, ses engagements s’élèvent à plus de 526 millions de dinars. Quasiment tout le système bancaire est concerné comme le montre le tableau ci-après.
Tous les professionnels du secteur financier savent très bien que la compagnie n’est pas en train de rembourser sa dette. Les détails au niveau des notes aux états financiers montrent des rééchelonnements et des reclassements au cours des différents exercices. La grande question maintenant concerne le sort de cette dette au niveau des comptes des banques. Autrement dit, est-ce que la société sera classée ? C’est un coût de risque additionnel très important qui est loin d’être le bienvenu. C’est pourquoi le marché actions risque de répondre négativement. Les établissements de crédit, qui souffrent déjà des anticipations de baisse d’activité en 2019 avec l’instauration de nouvelles règles prudentielles, risquent également de subir les conséquences de l’échec de la vente du cimentier.
L’actif tunisien est loin d’être attractif
Mais au-delà de la question de la Bourse, il est temps de reconnaître que l’actif confisqué tunisien n’est pas facile à vendre. Les meilleures sociétés ont d’ailleurs été rapidement liquidées. Ce qui reste, ce sont des entreprises qui ont de grandes difficultés, à l’exception d’Adwya qui a des problèmes de gouvernance. Nous entendons souvent des hommes politiques appeler à l’utilisation des recettes de cession de ces entités par l’Etat pour financer ses dépenses. Nous espérons que le résultat de ce processus de vente donne une idée sur la valeur marchande de ce « patrimoine ». L’objectif de cette année (500 millions de dinars) a été atteint, grâce à la banque Zitouna et sa filiale d’assurance. Malgré cela, réitérer une telle performance serait très difficile.
Mais est-ce qu’une telle fin a été attendue ? La réponse est clairement oui. D’ailleurs, selon un site d’informations économiques, l’une des entraves à la vente de Carthage Cement est la nature agricole du terrain sur lequel l’usine a été construite ! Cela sans compter les problèmes connus par tout le monde : le sureffectif, la faible demande locale et étrangère, la surcapacité de production du secteur. Que des problèmes qui n’encouragent pas à y mettre un seul sou. Typiquement, dans une opération de croissance externe, un investisseur cherche à créer rapidement de la valeur et créer des synergies. Il n’est pas prêt à hériter de problèmes sociaux et financiers.
Quelle conclusion à propos des entreprises publiques
Cette opération ratée donne également une idée sur l’ensemble de l’actif tunisien, public ou privé. La liste des tentatives d’ouverture de capital à un partenaire étranger a rarement abouti ces dernières années : Tunis Ré, AMI, Assad, GIF. Nous espérons que nous n’allons plus entendre les voix qui ne cessent de qualifier les entreprises publiques de « joyeux ». Il faut impérativement penser à des solutions concrètes pour ces entités qui se sont transformées en un fardeau national. De plus, et au-delà des difficultés d’exploitation, c’est l’image de tout un pays qu’il faut soigner. C’est le plus urgent.