L’IACE a partagé les principales recommandations issues de l’ensemble des panels organisés à l’occasion de la 33ème édition des Journées de l’Entreprise qui se sont déroulées les 7 et 8 Décembre 2018 à Sousse sous le thème : « L’entreprise et les réformes de rupture ».
Partant de l’idée que les réformes structurelles supposent d’adopter des mesures qui modifient fondamentalement le cadre institutionnel et réglementaire régissant l’activité économique et affectant le comportement des agents producteurs et consommateurs, l’IACE, par le biais de cette note, a voulu rompre les mesures usuelles et mettre l’accent sur l’importance d’un changement radical via l’adoption de réformes de rupture.
Assouplir les opérations de change…
Sur le plan économique, le durcissement de la politique monétaire et la rigidité de la réglementation des changes demeurent les deux points qui fâchent en Tunisie. Ainsi, certaines mesures visant l’assouplissement de la politique des changes pourraient être prises immédiatement pour faciliter les opérations de change, booster les exportations et atténuer la pression baissière sur le dinar. De ce fait, il a été recommandé de permettre aux personnes physiques résidentes d’ouvrir des comptes en devises, de réviser à la hausse le plafond de l’allocation pour voyages d’affaires, pour le fixer en devises (dollar ou euro) et non en dinar; assouplir les procédures d’établissement de la fiche d’investissement; supprimer graduellement le nivellement couverture (pour le banques) qui défavorise les entreprises résidentes par rapport aux non-résidentes; améliorer l’efficacité des services offerts par la SMT (Société Monétique de Tunisie) pour faciliter les transactions en devises à l’étranger pour les étudiants et les entrepreneurs et introduire de nouveaux produits dérivés de gestion du risque de taux et de change.
Les panélistes ont également recommandé d’autres mesures en relation avec l’amélioration de l’efficacité de la politique monétaire : il s’agit de développer le marché obligataire (pour élargir la gamme des instruments non conventionnels et réussir l’ancrage des anticipations via la courbe de rendement « forward guidance »); renforcer la coordination avec la politique macro-prudentielle (pour neutraliser les ramifications systémiques de certains choix de politiques monétaires et bénéficier de l’assouplissement des exigences macro- prudentielle en période de stress financier) et instaurer une meilleure coordination entre la BCT et les ministères.
Mettre le compteur à zéro…
S’agissant de la réforme fiscale, il en ressort en effet que cela nécessite non seulement d’apporter des remèdes efficaces aux maux du système fiscal en vigueur, mais aussi et surtout, de mettre « le compteur à zéro » en refondant l’architecture fiscale du pays en fonction de son potentiel et de ses gisements. Pour y arriver, les panélistes ont recommandé la simplification du système fiscal et l’exploitation optimale des gisements et ressources du pays via l’exploitation des gisements érodés (économie souterraine, les régimes forfaitaires, le secteur agricole, le secteur de l’immobilier locatif) ou encore l’exploitation de nouveaux gisements tout en s’orientant vers l’innovation et la création de nouvelles richesses à forte valeur ajoutée.
Outre la refonte du système fiscal, les intervenants ont appelé à l’allègement de la fiscalité des entreprises organisées à travers la réforme des règles d’assiette et la garantie d’une fiscalité qui ne compromet pas la trésorerie des entreprises.
Il a été également recommandé d’instaurer l’efficacité de l’appareil administratif chargé du contrôle fiscal et de la lutte contre la fraude fiscale tout en se focalisant sur la digitalisation totale de l’administration fiscale qui préconise un système d’information basé sur l’intelligence artificielle.
Lutter contre les pratiques nuisibles…
A ce stade, il a été fortement recommandé de remettre en cause l’idée traditionnelle selon laquelle le droit du travail produit des traitements uniformes, approche qui a conduit à de nombreux effets pervers et qui a paradoxalement créé » une inégalité par l’égalité « .
Aujourd’hui, l’horizon est plutôt celui des vraies réformes de rupture en vue de l’aménagement d’un nouveau droit du travail en Tunisie, permettant d’aboutir, grâce à une diversification croissante des règles de protection, à de nouveaux critères d’unification égalitaire et à une égalisation dans le progrès.
Dans cette perspective, le droit du travail est aujourd’hui appelé à renouveler ses techniques et ses méthodes de représentation de la doctrine des relations de travail en vue de parvenir à assurer des objectifs complémentaires et pas nécessairement divergents tout en se basant sur deux éléments en particulier, à savoir traduire les valeurs constitutionnelles du Travail décent, promouvoir le label social et lutter contre les pratiques malsaines nuisibles au marché du travail. Moderniser le cadre juridique applicable aux relations individuelles du travail et l’adapter aux nouvelles exigences de la flexisécurité et de la mobilité du travail est également fortement recommandé.
La réforme du système éducatif s’impose…
La transformation digitale provoque inévitablement des bouleversements profonds dans l’entreprise, impactant non seulement sa stratégie commerciale et marketing, mais aussi ses modes opératoires, ses processus métiers, sa structure organisationnelle, sa politique RH et tout son business modèle.
Du coup, une attention particulière doit être portée sur la réforme du système éducatif, par la généralisation des programmes de « Digital Literacy », la mise à niveau des cursus de formation, la formation et l’habilitation des professeurs, et l’introduction de nouvelles filières préparant aux métiers de demain. La réforme de la législation du travail est un autre levier à ne pas manquer pour la prise en compte des nouvelles formes de travail, l’adoption d’un cadre légal pour promouvoir l’innovation, la régulation de la création d’un écosystème d’innovation, la réglementation de la création de la propriété intellectuelle et le développement des programmes de citoyenneté.
La société civile peut également jouer un rôle très important, et faire la liaison entre l’université et l’entreprise, dans une logique de partenariat public-privé associatif, par le développement de programmes de formation et de reconversion professionnelle.