S’exprimant dans des sit-in successifs locaux de protestation (17 décembre 2010-14 janvier 2011), la contestation populaire a mis fin à l’ancien régime. Elle a inauguré une ère nouvelle. Il serait pertinent de définir “ la révolution’’ tunisienne, à l’occasion de son huitième anniversaire.
Alors qu’elle annonça le printemps arabe, que la géopolitique régionale et internationale mit à l’ordre du jour, pour créer le nouvel ordre d’un “grand Moyen-Orient’’, élargi si possible au Maghreb, la Tunisie réussit à limiter l’intervention extérieure, puisque sa “révolution’’ fut essentiellement l’œuvre de sa dynamique interne.
D’autre part, la Tunisie mit en œuvre le changement global annoncé, alors la guerre civile s’instaura en Syrie, en Libye et au Yémen, bloquant toute possibilité d’évolution institutionnelle.
Des révolutions non accomplies
A l’exception de la Tunisie et de l’Egypte, les révolutions arabes furent plutôt virtuelles. En tout cas, non accomplies.
L’Etat tunisien, fort de sa légitimité historique, résista aux bourrasques et s’accommoda du changement du régime. Nous devons certes reconnaître que l’émergence du pouvoir citoyen et les multiples sit-in de protestation le mirent à l’épreuve. Mais la tournure des événements le fit valoir et le conforta.
La transition démocratique tarda, il est vrai, à se terminer. Mais “il faut laisser du temps au temps’’, pour accomplir des mutations d’envergure et assurer le changement de modes de gouvernement séculaires.
Fait d’évidence, la Tunisie est une démocratie, qui assure la liberté d’expression. Nous n’occultons pas le décalage entre la classe politique et la population, dans cette démocratie nouvelle. Mais l’expérience est en mesure de promouvoir la gouvernance, pour instaurer une vie politique plus participative.
Les attentes sociales de la révolution n’ont pas été satisfaites
Fait d’évidence, les attentes sociales de “la révolution’’ n’ont pas été satisfaites. Le système économique connut un certain blocage, à la suite de l’affaiblissement de l’Etat, au développement des sit-in de contestation, à une certaine culpabilisation des hommes d’affaires et au développement du commerce parallèle. L’ouverture de l’importation aux alliés idéologiques et la concurrence effective de la production nationale ont affecté la balance commerciale, alors que la peur du terrorisme est responsable du déclin passager du tourisme. Cette situation préoccupante fut d’ailleurs confortée, dans une certaine mesure, par la participation limitée des compétences nationales. Cerise sur le gâteau, la chute du dinar, que le pouvoir n’a pas pu défendre.
L’actualité politique révèle cependant une prise en compte de la gravité de la situation socio-économique. Les diagnostics de l’Union Syndicale au sujet de la faiblesse du pouvoir d’achat et la nécessité d’assurer un redressement économique sont désormais partagés par l’ensemble de la classe politique, du pouvoir et de l’opposition. Saluons ce retour de la conscience, qui érige les priorités du développement.