Dans son article paru le 22 janvier au New York Times “Plus d’écoles et moins de tanks pour le Moyen Orient”, Thomas L. Friedman, conseiller économique à la Maison-Blanche, critique la politique des USA de l’utilisation de la force armée au Moyen-Orient.
L’Amérique n’avait-elle pas promis d’instaurer la démocratie au Moyen-Orient ? Qu’en est-il? Le résultat est un échec total. Dans sa tribune, Thomas L. Friedman, s’interroge :
“Comment se fait-il que le seul pays du Printemps arabe à avoir réussi à effectuer une transition relativement pacifique d’une dictature à une démocratie constitutionnelle – avec l’autonomisation totale de ses femmes – soit le pays auquel nous avons eu le moins à faire et auquel nous n’ayons jamais envoyé de soldats à se battre et à mourir? Ce pays c’est la Tunisie.”
La Tunisie est un modèle tellement important pour la région, mais de plus en plus fragile
D’après le journaliste américain, auteur et triple lauréat du prix Pulitzer, la démocratie tunisienne doit être encouragée car elle reste aujourd’hui très fragile. Une partie de l’argent dépensé en Afghanistan aurait pu être allouée à la Tunisie, ce qui lui aurait permis de renforcer sa démocratie naissante.
“Oui, la Tunisie est le seul pays à atteindre les objectifs que nous aurions tant souhaité atteindre pour l’Irak, la Syrie, l’Égypte, la Libye, le Yémen et l’Afghanistan. Il l’a fait après avoir accueilli plus des consultants du Corps de la paix américain au cours des 50 dernières années que de militaires américains. Et après avoir reçu seulement environ un milliard de dollars d’aide américaine (et trois garanties de prêt) depuis sa révolution démocratique de 2010-2011.
À titre de comparaison, les États-Unis dépensent actuellement environ 45 milliards de dollars par an en Afghanistan. 17 ans d’essais visant à le transformer en une démocratie pluraliste. C’est fou le contraste qui existe entre ces deux pays ! Surtout quand on considère que la démocratie autonome en Tunisie est un modèle tellement important pour la région, mais de plus en plus fragile.”
La Tunisie avait les bases culturelles pour soutenir une révolution démocratique
Thomas L. Friedman ajoute que si la Tunisie a pu réaliser sa transition démocratique c’est en partie grâce à “son père fondateur et dirigeant de la Tunisie de l’indépendance de 1956 à 1987 Habib Bourguiba » .
“Il a éduqué et responsabilisé les femmes tunisiennes et a permis l’émergence de groupes de la société civile relativement puissants – syndicats, syndicats d’avocats, groupes de femmes – qui étaient essentiels pour renverser le successeur tyrannique de Bourguiba et forger une nouvelle Constitution avec le mouvement islamique tunisien. La Tunisie bénéficiant également de peu de pétrole, elle a donc dû investir dans l’éducation de sa population. La Tunisie, en bref, avait les bases culturelles pour soutenir une révolution démocratique. “
Ainsi, l’éditorialiste du New York Times pense que sur les 45 milliards qu’aurait économisés les Etats-Unis en se retirant plus tôt de l’Afghanistan, deux milliards de dollars auraient pu être investis dans l’ensemble du monde arabe. De plus, le programme de bourses d’études et de visas -en particulier pour les femmes arabes des pays du Moyen-Orient – aurait pu être élargi.
Concernant la Tunisie, il aurait donné “ un prêt de 1 milliard de dollars sans intérêt et quadruplé la taille du Fonds tuniso-américain pour les entreprises pour favoriser les créations d’entreprises dans ce pays.”
Pour conclure, Thomas L. Friedman pense que l’utilisation de la force armée depuis le 11 septembre par les Etats-Unis a été un pur échec. Il conseille d’utiliser dorénavant avec les pays arabes et l’Iran “une méthode plus douce sans un seul combattant américain”.