Pour réussir le pari du réchauffement climatique, le financement s’impose. Le sujet demeure d’une importance capitale pour les générations futures et le contexte présent. Dans ce cadre, l’Association des tunisiens des grandes écoles (ATUGE) a organisé, ce 12 février à Tunis, une journée d’information sur le thème « Finance climat : une opportunité pour le secteur privé en Tunisie ».
Raoudha Gafrej, experte en Ressource eau et adaptation changement climatique est revenue, entre autres, sur l’impact du réchauffement climatique. En effet, d’après la spécialiste, la majeure partie du réchauffement a eu lieu lors des dernières décennies, accompagné d’une augmentation des émissions de GES (gaz à effet de serre) depuis les années 1950.
Ainsi, sur la base des estimations du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), un réchauffement compris entre +0.3°C et +4.8°C d’ici 2100 est probable (en comparaison avec la période 1986-2005). Elle a indiqué dans le même contexte que les projections d’élévation du niveau des mers entre la période 1986-2005 et 2100 sont comprises entre +26 to +82 cm. D’autres estimations prévoient une élévation jusqu’à 180 cm d’ici 2100, étaye-t-elle.
De la nécessité de lutter contre les gaz à effet de serre
Par ailleurs, plusieurs activités économiques et industrielles émettent les gaz à effet de serre. L’intervenante ne manque pas de citer plusieurs exemples. En effet, le relâchement de gaz à effet de serre se répartit sur plusieurs secteurs : centrale énergétique (21,3%), processus industriel (16,8 %), production agricole (12,20%), transport (14%). La Tunisie n’échappe pas à ces problématiques. Les projections climatiques, simulées par l’Institut national de météorologie (INM), montrent les évolutions suivantes :
- Baisse des précipitations de 5 % à 10 % à l’horizon 2050 et de 5 % à 20 % à l’horizon de 2011.
- Hausse de la température en 2050 de 1°C à 1,8°C et pour 2100, il est prévu de 2°C à 3°C.
Madame Gafrej a affirmé que la Tunisie à travers son Nationally Determined Contributions s’est résolument engagée sur une trajectoire de développement bas-carbone. Ainsi, l’intensité carbone de la Tunisie devrait passer de 0,541 téCO2/1000 DT de PIB en 2010 à 0,320 téC02/1000 DT en 2030; soit une baisse de cette intensité de 41% entre les deux dates. D’après l’intervenante, la Tunisie aura besoin d’un financement de 523 MU$$ pour le renforcement de ses capacités.
De son coté, Sana Joui, consultante expert changement climatique du secteur privé, est revenu sur les opportunités du financement pour le secteur privé, dans ce domaine. L’intervenante a commencé son intervention en définissant le financement climatique. En effet, le financement climatique est :
- Tout financement destiné aux actions d’atténuation des émissions des gaz à effet de
serre ou d’adaptation aux changements climatiques. - Tout apport financier ayant expressément pour objectif de favoriser un développement sobre en carbone ou résilient face aux changements climatiques.
- Le financement climatique vise à réduire les émissions et à renforcer l’absorption par les puits de gaz à effet de serre et accroître la résilience des systèmes humains et écologiques aux impacts négatifs des changements climatiques.
Dans le même contexte, elle affirme que les besoins prioritaires pour la finance climatique en Tunisie, 2015-2030 s’élève à 20 milliards de dinars. Par ailleurs, les sources de financement climatique ne manquent pas. La Tunisie a reçu plusieurs dons de plusieurs sources. En effet, la France, l’Allemagne et le Japon représentent les plus grands bailleurs de la Tunisie dans ce domaine. Les banques internationales sont présentes sur la liste : BAD, FIDA, BERD et BEI.
Par ailleurs, le fonds vert climat demeure le principal bailleurs de fonds. Il s’agit d’un mécanisme financier de l’Organisation des Nations unies, rattaché à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC).
Son objectif est la réalisation du transfert de fonds des pays les plus avancés à destination des pays les plus vulnérables, afin de mettre en place des projets pour combattre les effets des changements climatiques. Le secteur privé peut y accéder à travers des entités accréditées avec des opérations dans le secteur privé et la présentation des propositions de financement de manière spontanée ou en réponse à des appels à projets. À travers son mécanisme, la Facilité pour le Secteur Privé (PSF), le programme propose des dons, crédits/prêts pour le secteur privé, prises de participation par actions.
Voici les étapes à suivre pour accéder à un financement climatique
L’obtention du financement passe par plusieurs étapes, à savoir :
- Préparer une note conceptuelle avec l’entité accréditée ou l’AND;
- Garantir l’adhésion totale du pays bénéficiaire en obtenant une lettre de non objection signée par l’AND;
- L’entité accréditée soumet au FVC la proposition de projet accompagnée de la lettre de non-objection;
- Le Groupe Consultatif Technique Indépendant (ITAP) du fonds procède à une évaluation technique et présente ses recommandations;
- À la lumière du rapport et de l’évaluation technique, le FVC décide d’approuver ou non le financement;
- Si la proposition est approuvée, l’entité accréditée et le FVC négocient et signent un accord d’activité financé (Funded Activity Agreement – FAA).
Notons que la BAD, BEI, BERD, BM, KFW et PNUD sont des entités accréditées par le GCF spécifique au secteur privé.
Lors de son intervention, Chokri MEZGHANI, Directeur du Ministère des Affaires locales et de l’environnement, et point focal du Fond Vert Climat (FVC) est revenu sur l’autorité nationale désignée (AND). Il s’agit d’un comité plurisectoriel ayant une composition qui répond aux aires d’intervention. En effet, l’AND est une interface entre le pays et le GCF en charge de la soumission de la requête de financement. Cette dernière est accompagnée d’une lettre de non objection, tout en veillant à ce que la requête respecte les lignes directrice mises en place par le GCF et prenne en considération les priorités nationales et réponde aux exigences du fonds.