Les dérives de Regueb, une fausse école coranique, s’inscrivaient en fait dans la stratégie de combat des acquis, par les velléités d’institution d’une “éducation’’ parallèle, que l’Establishment tunisien, y compris le ministère des Affaires religieuses condamna. Nous n’y reviendrons pas. Mais l’occasion permet de reposer la question des structures d’enseignement préscolaires et primaires, en Tunisie.
Ainsi, les kouttabs jouaient un rôle important avant l’indépendance, soit celui d’initier leurs élèves à l’apprentissage du Coran, ainsi qu’à écrire, lire et compter. Ils assuraient essentiellement la préparation des élèves à l’entrée à l’enseignement zeitounien.
Par ailleurs, vu l’absence de jardins d’enfants, dans la société traditionnelle, ils accueillaient les enfants entre trois et cinq ans et leur assuraient la formation préscolaire. La réforme de l’enseignement tunisien permit la multiplication des écoles primaires et des collèges et lycées, préparant à l’entrée à l’université et à ses différentes composantes : sciences humaines, théologie, droit, sciences et techniques. Les mutations de la société tunisienne ont permis le développement des jardins d’enfants, marginalisant de fait les kouttabs, et réduisant leur rôle.
Cependant, réalité de La Palice, dans la société contemporaine, l’enseignement religieux ne doit guère être exclusif. Et l’apprentissage du Coran ne peut se limiter à sa mémorisation.
De plus, autre nécessité, il n’est plus question d’occulter la formation pédagogique de tout enseignant. De ce fait, l’apprentissage du Coran et l’enseignement religieux sont assurés par les instituteurs, possesseurs des titres appropriés. D’autre part, il faut veiller à l’application des droits des enfants. Ne perdons pas de vue que nous vivons à l’ère de l’internet, des tablettes et des réseaux sociaux. Pays d’avant-garde dans ces domaines, la Tunisie ne peut se permettre de perpétuer des structures d’antan. Le gouvernement a d’ailleurs opté pour l’intégration de la technologie de l’information dans ses institutions. L’enseignement ne peut donc rester à la traîne.
Or, des voies officielles surprenantes annoncent qu’elles mettent à l’ordre du jour un plan du retour des kouttabs. Elles le justifient hâtivement comme « un bouclier spirituel et religieux contre les courants terroristes ». On ne peut avancer par des marches en arrière.
En effet, la révolution scolaire bourguibienne et les exigences du progrès de la société actuelle ne peuvent se le permettre. Révisions importantes, il faudrait plutôt développer les structures préscolaires et scolaires, avec l’intégration de l’enseignement du coran. Et ce, dans une formation générale faisant valoir notre socle de valeurs. Enfin, il faudrait confier cette charge à des enseignants-pédagogues, sous la direction du ministère de l’Education, comme pour tous les niveaux de l’éducation.