Lorsqu’on rencontre aujourd’hui les femmes tunisiennes de la société civile qu’elles soient connues ou inconnues, l’on se rend compte qu’elles sont de vraies battantes. Elles ne baissent jamais les bras devant l’adversité. A l’occasion de la Journée du 8 mars, les dignes représentantes de la société civile et autres ont bien voulu nous livrer leurs pensées.
Huit mois après l’entrée en vigueur de la loi organique n° 2017-58 du 11 août 2017, relative à l’élimination de la violence à l’égard des femmes, qu’a-t-on réalisé au niveau des droits et libertés en réalité ? Ce sont les points évoqués lors du colloque organisé par la coalition nationale contre les violences sur le suivi de la mise en oeuvre de la loi.
La coalition est composée des associations féministes regroupant l’ATFD, la LTDH, l’AFTURD, Beity, la LET, WAAI, la FIDH, Euromed Droits, et Oxfam.
Beaucoup reste à faire au niveau de l’application de la loi
D’après les intervenantes de la coalition nationale, les textes d’application relatifs à cette loi n’ont pas encore été promulgués. De ce fait, les mécanismes de coordination avec la société civile ne sont pas formalisés. De même, le système de protection ( assistance téléphonique, refuges, soutien psychologique, etc.) prévu par la loi n’est toujours pas mis en place.
C’est une bataille de longue haleine, affirme Héla Gharbi, directrice d’Oxfam Tunisie, mettant l’accent sur certaines défaillances. A titre d’exemple, l’absence de budgétisation a entravé la mise en place de l’observatoire national de lutte contre les violences faites aux femmes et aucun calendrier n’a été annoncé à cet égard. Une bonne partie d’entre elles évoquent le manque d’encadrement pour les femmes victimes de violences.
Par ailleurs, Amal Yakoubi, chargée de projet “Justice de genre” Oxfam en Tunisie, fait le même constat que beaucoup reste à faire au niveau de l’application et la mise en oeuvre de la loi. Elle précise dans ce contexte: « Aujourd’hui, outre l’absence de budget alloué à la mise en oeuvre de la loi dans le budget de l’Etat, il y a un manque manifeste de volonté politique à proposde cette loi. Pas facile de changer les mentalités. Vous savez, la violence c’est la violence, mais contribuer à la réduire, c’est qui nous fera avancer en tant qu’ Etat de droit et société civile ».
Mon González, ministre conseillère de l’Ambassade d’Espagne, salue le courage des femmes tunisiennes. Elle souligne: « Les des droits acquis par les femmes tunisiennes sont impressionnants depuis l’indépendance de la Tunisie. La Tunisie est un pays dont on peut être fier en tant que femmes et c’est un exemple à suivre dans le monde arabe ».
Son message aux femmes du monde : « Soyons fortes, et continuons la lutte pour nos droits. Et nous devons être patientes, soutenir les hommes pour qu’ils nous soutiennent ».
Hafidha Chekir, professeure de droit et activiste féministe, insiste sur les difficultés dans la mise en oeuvre de ladite loi. Elle précise: » Bien que la loi demande aux autorités d’adresser les femmes à des centres, elle ne prévoit aucun mécanisme pour leur financement, que ce soit pour les refuges gouvernementaux ou ceux gérés par des associations. «
Selon Mme Chekir, il est important de prendre les mesures nécessaires, assurer la gratuité de la prise en charge médicale et psychologique des femmes victimes de violence dans les établissements sanitaires publics.
Elle conclut: » Prévoir des mécanismes de financement de la société civile ( pour le court, moyen et long terme) pour la mise en oeuvre et le suivi de la loi.